mercredi 25 juillet 2018

Séance 35


HOT ARIEGE
Du swing, des blue notes et du rythme
Avec Bruno Blue Boy !

Séance 35 

1/ John Brim
Du blues pour commencer l’émission, du blues de Chicago, avec le chanteur guitariste John Brim, né en 1922 dans le Kentucky et décédé en 2003.
C’est en 1945 qu’il se fixe à Chicago où il travaille dans une blanchisserie. C’est un habitué de la fameuse rue Maxwell, la Maxwell Street, où se produisent les bluesmen de Chicago. En 1947 il épouse Grace Millard qui chante et joue de l’harmonica. Plus tard elle jouera aussi de la batterie et l’accompagnera.
En 1951 il enregistre un premier disque avec Big Maceo pour Fortune. En 1951-1952, il enregistre pour Random et J.O.B. Il joue alors fréquemment avec Jimmy Reed, Eddie Taylor, Albert King.
En 1953 il réalise plusieurs sessions pour Chess. Il enregistre notamment le morceau Ice Cream Man qui ne sera édité que seize ans plus tard, en 1969. On a déjà parlé de la politique de Chess qui ne voulait pas faire d’ombre à ses artistes vedettes. On écoute Ice Cream Man. John Brim est au chant et à la guitare, Eddie Taylor à la guitare également, Little Walter à l’harmonica et Elgin Evans à la batterie.
Ce morceau a fait l’objet d’une reprise en 1978 par le groupe de hard rock Van Halen, ce qui a permis à John Brim de toucher de substantiels droits d’auteur. Il est toujours un peu exaspérant de penser que les bluesmen ont eu tellement de mal à survivre dans les années cinquante soixante, que lorsqu’ils touchent trois sous c’est parce que d’autres ont puisé dans leurs œuvres et qu’en fin de compte ils restent largement méconnus. D’où une émission comme celle de Hot Ariège qui tente modestement de rétablir les choses. 
En 1953 toujours, John Brim enregistre aussi pour Parrot et le morceau Tough Times connaît un certain succès. En 1955-1956, John Brim enregistre à nouveau pour Chess. Jusqu’en 1960, John Brim et sa femme jouent dans des clubs de Chicago. Ils renoncent ensuite à la carrière. John Brim fonde son propre label, BB, chez lequel il sortira un disque en 1971. Grâce aux droits d’auteur générés par Van Halen, il ouvre ensuite un night club. 
Il réapparaît en 1991 au Chicago Blues Festival. A noter qu’il est accompagné par un groupe qui s’appelle les Ice Cream Men, alors que cela n’a rien à voir avec son morceau de 1953 : c’est lié au fait que le leader d’origine, Smokey Smothers, était vendeur de glaces (« ice cream » en anglais).  
En 1994 il sort un album chez Tone Cool Records. En 1997, il participe au San Francisco Blues Festival.
Comparé à la plupart des autres bluesmen de Chicago, John Brim joue comme eux une musique issue du Mississippi mais avec la particularité que lui n’est pas né dans le Mississippi. En fait il a appris le blues par le disque, notamment ceux de Big Bill Broonzy et de Tampa Red, deux géants du blues avant-guerre à Chicago. Mais il a su s’immerger totalement dans le blues local.
John Brim, retenez ce nom ! C’est un excellent bluesman de Chicago.


2/ Roy Brown 
Du blues on passe au rhythm and blues avec le chanteur pianiste Roy Brown. Roy Brown est né en Louisiane à une date controversée, probablement en 1920 même si la date la plus couramment admise est 1925. 
Roy Brown commence dans le gospel. Il fait aussi de la boxe. Il gagne un concours de chant en 1945. Ensuite il chante dans des clubs au Texas, en Louisiane. Son style d’alors est celui d’un crooner à la Frank Sinatra. Problème : il est rejeté par les Noirs parce que son répertoire est blanc et sa voix sonne comme celle des Blancs et il est rejeté par les Blancs parce qu’il est noir. Pas facile les années quarante aux Etats-Unis !
Le déclic se produit lorsqu’il signe chez De Luxe en 1948. Le titre Good Rockin’ Tonight atteint la treizième place au Billboard rhythm and blues. Il y a quand même un peu de quoi faire rager Roy Brown dans l’affaire, car il avait proposé le morceau l’année d’avant au shouter Wynonie Harris qui l’avait refusé. Et voilà qu’à peu près en même temps que lui Wynonie Harris sort une cover version du morceau, que nous avons d’ailleurs l’occasion d’entendre lors d’une précédente émission, qui, elle, atteint la première place au Billboard !
On écoute la version originale de Roy Brown.
Ce morceau est devenu un grand standard du rock ‘n’ roll, notamment après sa reprise par Elvis Presley. Roy Brown l’interprète à sa façon, avec une voix veloutée qui ancre le morceau dans le rhythm and blues plutôt que dans le rock ‘n’ roll, contrairement à la version syncopée de Wynonie Harris qui annonçait déjà le style qui allait faire fureur auprès des jeunes quelques années plus tard.
Chez De Luxe, Roy Brown place pas moins de 14 titres dans les charts, dont Hard Luck Blues numéro 1 en 1950. Cette performance fait évidemment de Roy Brown l’une des stars du rhythm and blues. 
Roy Brown enregistre aussi des morceaux pour le label King. Une affaire de royalties impayés l’amène à intenter un procès contre King en 1952. Les pratiques douteuses, voire mafieuses, des compagnies de disques ont été dénoncées par d’innombrables artistes. Mais bien peu ont osé aller en justice. C’est un problème que les salariés connaissent bien : mettre son patron aux prud’hommes, c’est le meilleur moyen de se faire foutre à la porte. S’attaquer à une compagnie, c’est s’attaquer à ceux qui vous permettent d’accéder au public. Roy Brown a gagné son procès. Et devinez quoi ? Il a eu beaucoup de mal par la suite à sortir des disques malgré sa notoriété. Beaucoup pensent qu’il a été blacklisté. 
Cela dit, la malveillance n’explique pas tout. Contrairement à Fats Domino ou Big Joe Turner, Roy Brown n’est pas parvenu malgré tous ses efforts à monter dans le wagon du rock ‘n’ roll, ce qui était le seul moyen de rebondir pour les artistes de rhythm and blues à partir du milieu des années cinquante. Or, on l’a dit, la voix et le style de Roy Brown se prêtaient assez peu à une telle reconversion.
Roy Brown parvient quand même à obtenir un hit en 1957, grâce à sa collaboration avec Fats Domino avec lequel il co-écrit le titre Let The Four Winds Blow. Chose assez incroyable, il est même retourné chez King par la suite ! Cela montre bien qu’il n’avait plus trop le choix. Il n’a pas renoué avec le succès pour autan mais il réussit encore à décrocher un hit en 1970 chez Mercury,  Love For Sale. 
J’ai parlé d’efforts de Roy Brown pour gagner le public du rock ‘n’ roll. On écoutera les morceaux qui ont concrétisé ses efforts dans de prochaines émissions.


3/ Eddie Cochran
Et nous passons à présent à quelqu’un qui n’a pas eu d’efforts à faire pour devenir une vedette du rock ‘n’ roll puisque qu’il s’est imposé spontanément comme l’une des plus grandes stars du genre : il s’agit d’Eddie Cochran.
Né en 1938, il décède dans un accident de voiture au cours d’une tournée en Angleterre à l’âge de 22 ans en 1960. Sa vie et sa carrière professionnelle auront donc été ultra courtes. Engagé par la firme Liberty de Los Angeles en 1956, Eddie Cochran ne perce qu’en 1958 avec Summertime Blues. Selon le mot de Charlie Gillett, Eddie Cochran est arrivé à contretemps pour les Etats-Unis. 1958, c’est déjà tard pour le rock ‘n’ roll. En revanche, la tournée qu’il fit en Angleterre avec Gene Vincent en 1960 au cours de laquelle il a laissé la vie a eu un énorme retentissement en Europe. Musicalement il avait inventé un nouveau style de rock ‘n’ roll avec une guitare rythmique agressive, lourde. Et les paroles de ses chansons, plus son look, lui permettaient d’incarner l’esprit de révolte adolescente comme James Dean avait pu le faire dans ses films.
On écoute Summertime Blues.
Le thème de la chanson est simple. Un lycéen en vacances, qui a trouvé un emploi temporaire, s’entend dire : « Tu n’auras pas la voiture, parce que tu n’as pas travaillé assez tard. » Il répond : « Je vais soumettre mon cas aux Nations Unies. » Son père, sentencieusement, lui explique alors : « J’aimerais t’aider, fiston, mais tu n’as pas l’âge de voter. » Et Cochran conclut : « Il n’y a pas de remède au blues de l’été ».  
Ce genre de paroles mélange l’ironie malicieuse d’un Chuck Berry à quelque chose de l’esprit de mai 68. C’est ce style qui va faire fureur en Europe dans les années qui suivent, qui va inspirer les rockers français du début des années soixante qui ont largement puisé dans le répertoire d’Eddie Cochran et qui va aussi inspirer plus tard les premiers groupes de rock anglais qui donneront à l’esprit de révolte une dimension nouvelle.
Eddie Cochran est un symbole du rock ‘n’ roll pur et dur, sauvage et agressif, et de l’époque des blousons noirs.  Pour nombre de fans, il a remplacé Elvis parti au service militaire et revenu crooner plutôt que rocker. Et sa disparition accidentelle précoce a laissé de lui une image intacte.


4/ Ed Bell
On change complètement de genre à présent. Nous allons parler du chanteur guitariste Ed Bell. Retour aux sources, retour au blues. Ed Bell est né en 1905 en Alabama. La date de sa mort n’est pas connue avec exactitude : on trouve selon les auteurs 1960, 1965 ou 1966.
Ed Bell commence à jouer à Greenville dans l’Alabama où il acquiert une grande notoriété. C’est sans doute cette notoriété qui lui permet de réaliser en 1937 à Chicago, c’est-à-dire très loin de là où il vivait, une session d’enregistrement pour Paramount. Les quatre titres enregistrés ont été édités. L’un d’eux, Mamlish Blues, a obtenu un certain succès. On l’écoute.
Il s’agit d’un enregistrement Paramount des années vingt, autant dire que le son n’est pas top. Marc estime que c’est une marque de mépris du label pour les artistes noirs de l’époque.
A noter que le mot « mamlish » ne fait pas partie de l’anglais classique. C’est un mot utilisé dans certains blues de l’époque et sa signification n’est pas très claire. Selon Jean-Paul Levet, auteur d’un ouvrage de référence sur le langage des Noirs des Etats-Unis intitulé « Talkin’ That Talk », paru aux Editions Hattier, ce mot n’est utilisé que pour renforcer le sens du mot suivant. Par ailleurs, Mamlish Records a été un label de blues dans les années soixante-dix. 
La suite de la vie d’Ed Bell est un peu mystérieuse. Les notes fournies avec le CD intitulé « Ed Bell (1927-1930) » indiquent que les auteurs s’accorderaient aujourd’hui sur le fait que le bluesman qui a enregistré pour CBS à New-York en 1929 sous le nom de Sluefoot Joe serait Ed Bell. La session comporte huit titres.
De la même façon, ces notes qui se basent sur les travaux d’un chercheur dénommé Don Kent, indiquent que le bluesman connu sous le nom de Barefoot Bill serait aussi Ed Bell. Le CD date de 1992, on ne sait pas de quand datent les recherches de Don Kent. Mais Arnaudon, dans son dictionnaire du blues paru en 1977, mentionne lui qu’Ed Bell se serait associé à Barefoot Bill, qu’il aurait joué à ses côtés et qu’ils se seraient rendus ensemble à Atlanta en 1928. Alors où est la vérité ? Je n’en sais rien. Barefoot Bill a fait quatre sessions pour Columbia en 1929-1930. En tout état de cause, peu après Ed Bell a renoncé au blues et s’est fait pasteur.
Pour terminer, les causes de la mort d’Ed Bell sont controversées. Certains parlent de mort naturelle, d’autres de meurtre ; on évoque un décès durant une marche pour les droits civiques, certains parlent même de magie noire ! Ce genre de mystère fait aussi partie de la magie du blues.


5/ Little Milton
On reste dans le blues mais dans un registre plus moderne: nous allons parler de Little Milton, né en 1934 dans le Mississippi, mort en 2005. Son nom est James Milton Campbell Jr.
Little Milton a commencé par chanter du gospel. A 12 ans, il est chanteur de rue. Il vire au blues, apprend la guitare, il est alors influencé par T-Bone Walker. En 1953 il forme un groupe, les « Playmates Of Rhythm ». Il a la chance de retenir l’attention d’Ike Turner, talent scout (c’est-à-dire chercheur de talents) de la maison Sun à Memphis. En 1953, 1954, il enregistre pour Sun. Le critique Gérard Hertzhaft le qualifie dans cette période de « bon imitateur de B.B. King ». 
A la fin des années cinquante, il travaille dans le sud et enregistre pour des marques diverses. Il s’établit dans l’Illinois et il fonde sa maison de disques, Bobbin. Il enregistre alors plusieurs sessions et le morceau Lonely Man est un premier succès. La marque Bobbin passera ensuite un contrat avec Chess. 
C’est avec Chess que sa carrière décolle vraiment. D’abord avec des morceaux comme So Mean To Me en 1962, puis Blind Man en 1964. Et en 1965 We’re Gonna Make It, numéro 1, puis Who’s Cheating Who ?, numéro 4 au hit parade rhythm and blues, font de lui une grande vedette nationale.
On écoute un morceau intitulé I Can’t Quit You Baby, tiré d’un album à succès paru en 1959 « Grits Ain’t No Groceries ». I Can’t Quit You Baby est une reprise d’un morceau écrit par Willie Dixon pour Otis Rush paru en 1956.
Little Milton a continué à remporter des succès en virant de plus en plus dans la soul music sans même plus jouer de la guitare, avec des arrangements orchestraux sophistiqués (chœurs féminins, violons etc.) qui diluent complètement la force expressive de son style. Mais c’est à la mode et ça marche ! Les problèmes arrivent quand Leonard Chess meurt en 1969 et la sous-marque de Chess, Checker, qui distribue les titres de Little Milton, sombre. Little Milton rebondit en signant chez Stax. Il continue à remporter des succès.  
Toutefois la firme Stax à son tour connaît la banqueroute en 1975. Little Milton galère alors d’une maison à une autre sans retrouver la place qu’il s’était forgée. Il continuera cependant à se produire et à faire paraître des albums jusqu’au bout.
Little Milton se situe au carrefour du blues et de la soul. C’est un excellent guitariste, inspiré de T-Bone Walker et B.B. King, qui est au meilleur quand il se situe dans le registre du blues sans que sa musique ne soit étouffée par une orchestration trop lourde.


6/ Skeets McDonald
On change de genre, place à la country music à présent avec le chanteur guitariste Skeets McDonald. Enos William McDonald est né en 1915  dans l’Arkansas et il est mort en 1968. Il a été surnommé Skeets dans son enfance en raison de sa manière de prononcer le mot moustique (mosquito en anglais). 
Il commence sa carrière en jouant dans le Michigan avec les Lonesome Cowboys en 1935-1936. Il forme un groupe, part à l’armée, il fait de la radio et de la télé. Il commence à enregistrer en 1950 pour le label Fortune au sein de l’orchestre de Johnnie White. Il enregistre ensuite sous son nom pour London et pour Mercury. 
En 1951 il va à Los Angeles et signe chez Capitol. Il enregistrera pour ce label plus de 80 titres jusqu’en 1958. En 1952, il obtient un immense succès avec Don’t Let The Stars Get In Your Eyes, resté numéro 1 au Billboard country music pendant dix-huit semaines. 
On écoute un morceau de cette période, Don’t Push Me Too Far, enregistré en 1956. Skeets McDonald chante avec Otis William Jo Maphis et Lewis Talley à la guitare, Ralph Mooney à la steel guitar, Jelly Sanders au violon, Clarence Bud Dooley à la basse et Pee Wee Adams à la batterie.
Un morceau intéressant, à la lisière de la country et du rockabilly. Le violon et la steel guitar l’inscrivent dans le style country, tandis que le rythme et le traitement sonnent rockabilly. Skeets McDonald penchait clairement vers la country, mais la firme l’incitait fortement à jouer du rockabilly. N’oublions pas qu’on est en 1956 !
Cette année-là, en 1956, il est accompagné par le jeune Eddie Cochran sur deux morceaux, You Oughta See Grandma Rock et Heart Breakin’ Mama, devenus par la suite des classiques du rockabilly.
En 1959, Skeets McDonald signe chez Columbia. Il placera quatre hits dans le hit-parade country entre 1960 et 1967. Aujourd’hui, alors qu’il a connu des succès importants et créé plusieurs standards de country et de rockabilly, le nom de Skeets McDonald n’est pas très connu, en dehors des amateurs, bien moins que celui de Johnny Cash par exemple, alors que leurs parcours sont très semblables. C’est un peu étrange, sans doute une question de promotion, de pub. En tout cas on aura l’occasion d’entendre à nouveau du Skeets McDonald dans Hot Ariège.


7/ Christine Kittrell
Et c’est une chanteuse qu’on écoute maintenant, une chanteuse de blues, Christine Kittrell née Christina Joygena Porter en 1929 à Nashville, décédée en 2001.
Christine Kittrell commence sa carrière professionnelle en 1945 dans l’orchestre de Louis Brooks, puis avec Big Joe Turner. En 1951, elle réalise son premier enregistrement pour Tennessee Record. Elle tourne dans les clubs de Nashville et de La Nouvelle Orléans. En 1953 elle enregistre pour Republic ; Little Richard l’accompagne au piano sur deux morceaux et comme chanteur d’arrière-plan sur un autre. En 1954 elle travaille avec Johnny Otis, Earl Bostic, Louis Armstrong, B.B. King, John Coltrane. Elle fait ensuite du gospel puis arrêté quelques années.
On la retrouve en 1959, date à partir de laquelle elle enregistre à nouveau pour Champion, Vee-Jay, Federal King. Vee-Jay fait paraître en 1962 un 45 tours avec sur la face A I’m A Woman et sur la face B It’s Nobody’s Fault.    
On écoute le morceau de la face A, I’m A Woman, composé par le tandem Jerry Leiber / Mike Stoller et repris plus tard par la chanteuse Peggy Lee.
On a écouté la face A du 45 tours. Promis, on écoutera la face B dans une autre émission de Hot Ariège.
Dans les années soixante, Christine Kittrell chante pour l’U.S. Army en Asie du sud est. Son dernier enregistrement date de 1968. Elle continue ensuite à chanter dans des clubs jusque dans les années quatre-vingt-dix. 


8/ Sam & Kirk McGee 
Voici maintenant un tout autre genre avec les frères McGee. Aujourd’hui on nomme ce style « old time country music », c’est-à-dire country d’autrefois, alors qu’on a longtemps appelé cela « folksong ». Cette nouvelle appellation présente à mes yeux des avantages et des inconvénients. L’avantage, c’est de relier le genre à la country et il est clair que le lien est évident. Mais ce lien n’est pas absolument partout naturel, notamment en raison de l’opposition entre le nord et le sud des Etats-Unis. C’est le premier désavantage : on occulte un peu avec cette appellation le fait que les traditions celtiques qui constituent le fond de cette musique ont été principalement conservées dans les Appalaches, c’est-à-dire plutôt le nord-est des Etats-Unis que le sud où a émergé la country. Le deuxième désavantage, c’est d’occulter l’apport noir, très présent dans ce qu’on appelle le « folk », et beaucoup moins dans la country traditionnelle, devenue d’ailleurs plus tard un genre musical connoté « sudiste blanc ». 
Revenons aux frères McGee qui sont originaires du Tennessee. Sam, Samuel Fleming, est l’aîné ; il est né en 1894, décédé en 1975 et tient la guitare. Kirk, David Kirkland, est le cadet, né en 1899, décédé en 183 ; lui joue habituellement soit du violon, soit du banjo. Je parle des instruments habituels, car les deux savaient jouer d’à peu près tous les instruments.
Ce sont des Noirs qui ont appris à Sam à jouer de la guitare et l’influence du blues restera près présente dans son œuvre. Les deux frères participent au Grand Ole Opry, le concert radiophonique (qui ne s’appelait pas encore comme ça) dès 1926. Cette même année, ils réalisent leurs premiers enregistrements au sein de l’orchestre d’Uncle Dave Macon. Avec cet orchestre, ils vont à New-York. C’est là qu’ils vont faire leurs premiers enregistrements en duo.
En 1931 ils forment les Dixieliners, un trio avec Arthur Smith. Ce dernier deviendra célèbre une décennie plus tard avec son fameux Guitar Boogie. Ils jouent ainsi, en trio, jusqu’en 1938. Curieusement, ils n’enregistrent pas ensemble. Mais les frères McGee, eux, dans le même temps, vont enregistrer en duo.
On écoute un morceau de cette période, 1934 exactement. C’est leur morceau le plus connu, devenu un standard du genre, Brown’s Ferry Blues.  
Dans les années quarante, les frères McGee travaillent avec Roy Acuff, Ernest Tubb, Bill Monroe. Fin des années cinquante, c’est le folk revival (qui a touché le blues, on en a beaucoup parlé dans Hot Ariège). Les frères McGee sont « redécouverts » et enregistrent à nouveau. Cela se prolonge dans les années soixante. Ils se sont arrêtés dans les années soixante-dix.  
Les frères McGee, c’est une bonne synthèse entre la tradition des Appalaches et l’influence du blues.


9/ Lonnie Brooks
Et voici maintenant du blues, pur et dur, avec le guitariste Lonnie Brooks. Attention, un Brooks peut en cacher un autre ! Il ne faut pas confondre Lonnie Brooks, dont le vrai nom était Lee Baker Junior et qui a été surnommé un temps Guitar Junior, avec un autre guitariste dont on a parlé dans une émission précédente et qui s’appelait Junior Brooks. Je sais, ce n’est pas évident, mais bon, ce ne sont pas les mêmes, quoi !
Lonnie Brooks est né en Louisiane en 1933. Il est mort l’an dernier, le 1er avril 2017. En 1952 il se rend au Texas, il travaille dans la construction. En 1955, il est repéré par Eddie Shuler, le patron du label louisianais Goldband, qui le fait enregistrer sous le nom de Guitar Junior. Il obtient un certain succès avec des morceaux comme Family Rules ou The Crawl. 
En 1959, il se fixe à Chicago et c’est là qu’il adopte le nom de Lonnie Brooks. Il travaille avec Jimmy Reed et participe à des enregistrements avec lui. Dans les années soixante il enregistre pour Mercury et entre 1963 et 1967 pour Chess. Son premier album paraît en 1969 chez Capitol. Il reprend alors son premier surnom de Guitar Junior qu’il garde jusqu’en 1972. Je sais, il faut suivre ! En 1975 il participe à la tournée européenne du Chicago Blues Festival et il enregistre pour la marque française Black & Blue. 
En 1978, il est choisi par Bruce Iglauer, le patron du label Alligator, pour faire partie d’une série qui deviendra prestigieuse, Living Chicago Blues. On écoute un morceau de cette période, Move Over Little Dog. 
Lonnie Brooks n’enregistre plus par la suite que chez Alligator. Il en sortira sept albums.
Certains critiques qualifient la musique de Lonnie Brooks de « féroce ». c’est sans doute dû à son jeu de guitare très incisif. Il aura eu en tout cas un parcours rare : né en Louisiane, il échappe au swamp blues, il fait ensuite du rock ‘n’ roll et finit dans le blues pur. Sauf erreur, c’est un cas unique !


Morceau non diffusé

10/ Lightnin’ Slim
Du blues encore, et toujours de la guitare, mais du swamp blues justement : voici le chanteur guitariste Lightnin’ Slim ! On a déjà abondamment parlé du swamp blues, du producteur J. D. Miller et plus spécialement de Lightnin’ Slim, de son vrai nom Otis Hicks, chanteur guitariste né en 1913 mort en 1974, qui fut le premier artiste noir à enregistrer pour le producteur Jay Miller. 
On écoute donc tout de suite Miss Fannie Brown. 
Lightnin’ Slim - Miss Fannie Brown
Superbe interprétation swamp blues d’un morceau de rhythm and blues créé à l’origine par Roy Brown. 


Vous pouvez écouter les morceaux présentés ici en cliquant sur le titre de la chanson en ROUGE

Vous Pouvez écouter "Hot Ariège" en direct les mercredis a 19h sur Radio Transparence :

https://www.radio-transparence.org/

Merci pour votre visite & Bon Blues !!

mercredi 18 juillet 2018

Séance 34


HOT ARIEGE
Du swing, des blue notes et du rythme
Avec Bruno Blue Boy !



Séance 34

1/ Robert Johnson
On commence l’émission avec Robert Johnson, une figure légendaire du blues, né en 1911, mort en 1938. Nous avons déjà évoqué Robert Johnson dans Hot Ariège, un personnage fascinant, dont on dit qu’il aurait vendu son âme au diable en se rendant de nuit à un certain carrefour, un être tourmenté, instable, qui cherchait un peu trop d’affection chez les femmes des autres. Son mentor, pionnier du blues du Delta, l’immense Son House, l’aurait dit-on mis en garde contre ce penchant dangereux, surtout dans le monde dans lequel vivaient les bluesmen à l’époque. Et la vie de Robert Johnson s’est arrêtée à 27 ans, empoisonné par un mari jaloux.
Remarqué par un agent recruteur de la compagnie ARC Vocalion, Robert Johnson a enregistré 29 faces au Texas pour cette compagnie en deux séances d’enregistrement : la première en 1936 dans une chambre d’hôtel à San Antonio, la seconde en 1937 à Dallas.
On écoute, que dis-je ?, on déguste la seconde prise de Come On In My Kitchen. 
« Tu ferais mieux de venir dans ma cuisine, il va pleuvoir dehors. » C’est une histoire de femme volée à son meilleur ami qui l’a reprise et qui ne reviendra pas.
29 morceaux, voilà ce que nous a laissé Robert Johnson ! 29 morceaux, c’est avec cela qu’il s’est bâti une réputation extraordinaire déjà de son vivant et qu’il est entré dans l’histoire du blues. Il faut dire que ces 29 morceaux sont exceptionnels. Un chant farouche, une intensité émotionnelle incroyable, des basses ambulantes vigoureuses, un jeu de bottleneck impressionnant ; ajoutez à ces ingrédients une touche de poésie sublime et vous aurez la recette de Robert Johnson pour changer l’histoire du blues ! Tous les grands noms du blues de Chicago de l’après-guerre, de Muddy Waters à Elmore James en passant par Howlin’ Wolf, sont les héritiers de Robert Johnson.


2/ Koko Taylor
Et voici du blues encore, mais du blues d’après-guerre cette fois, avec une chanteuse, Koko Taylor. Son vrai nom est Cora Walton, elle est née en 1928 à Memphis et elle est décédée en 2009.
Elle commence en chantant du gospel à l’église. Elle se fixe à Chicago en 1953 et fréquente les clubs de blues au début des années soixante. Elle devient la protégée du pape du blues de Chicago à l’époque, Willie Dixon qui lui obtient en 1963 un enregistrement pour un petit label, USA. L’année suivante, en 1964, c’est plus sérieux, elle signe chez Chess, la grande maison du blues à Chicago (avec sa concurrente Vee-Jay).
On écoute un de ses premiers enregistrements, en 1964 : What Kind Of Man Is This ?. Elle est accompagnée par la crème des musiciens de Chicago : Big Walter Horton à l’harmonica, Lafayette Leake au piano, Buddy Guy et Robert Nighthawk à la guitare, Jack Myers à la basse et Clifton James à la batterie.
En 1965, Koko Taylor décroche un hit avec Wang Dang Doodle, une reprise d’un morceau de Howlin’ Wolf, qui atteint la quatrième place au Billboard rhythm and blues et se vend à un million d’exemplaires.
Koko Taylor se fait alors connaître par des tournées dans les Etats-Unis. Elle participe également à la tournée de l’American Folk Blues Festival de 1967, avec Hound Dog Taylor et Little Walter.
En 1975, elle signe chez Alligator chez lequel elle sortira neuf albums. On la voit apparaître dans le film de John Landis Blues Brothers 2000, la suite du premier Blues Brothers. Elle ouvre un club de blues qui tournera une dizaine d’années. Son dernier album est sorti en 2007.
Koko Taylor est l’une des rares chanteuses de blues pur à avoir émergé après-guerre. Son style rageur colle à merveille au blues de Chicago. Dommage peut-être qu’elle utilise un peu trop le « growl » vocal.    


3/ Eddie Hope
Et voici du blues encore, dans le style Chicago. L’auteur est totalement inconnu, il s’appelle Eddie Hope et il a sorti un 45 tours en 1956 sur un petit label, Marlin. On écoute l’un de ces morceaux, A Fool No more. 
En fait, le disque vinyl indique comme interprète Eddie Hope & The Mannish Boys. Mais qui était-ce ? Mystère. En tout cas, c’est du bon Chicago blues.   
D’ailleurs la compilation d’où ce morceau est tiré est elle-même excellente. On y trouve d’ailleurs l’autre face du 45 tours d’Eddie Hope, Lost Child.  Et on y trouve aussi quantité de bluesmen connus ou moins connus, mais tous les morceaux sont au top. Le CD s’appelle « Gonna Rock The Blues », il est paru chef Official en 1995, il est apparemment toujours disponible. Je le recommande donc. Il existe d’ailleurs un deuxième CD intitulé « Gonna Rock The Blues Again », toujours chef Official, tout aussi recommandable.


4/ Mahalia Jackson
Nous allons maintenant parler d’une grande dame du gospel, Mahalia Jackson. Elle est née en 1911 à La Nouvelle Orléans et elle est décédée en 1972.
A l’âge de sept ans, elle travaille comme bonne dans des familles blanches. En 1927 elle rejoint une tante à Chicago et se joint aux Johnson Gospel Singers, un des premiers groupes mixtes de l’époque. Jusqu’en 1935 elle est ouvrière et domestique tout en fréquentant le monde du gospel. Elle fait la connaissance de Thomas Dorsey, ancien chanteur de blues partenaire de Tampa Red devenu un grand promoteur du gospel, qui l’accompagne au piano pendant une dizaine d’années.
Elle réalise ses premiers enregistrements pour la compagnie Decca en 1937 : quatre faces qui ne défraient pas la chronique. Elle ne reprend le chemin des studios qu’en 1946 pour la firme Apollo. C’est l’année suivante qu’elle décroche le succès avec Move On Up A Little Higher qui se vend rapidement à plus d’un million d’exemplaires. C’est le morceau qu’on écoute.
1947, c’est le décollage. Mahalia Jackson chante dans un stade de football, elle se produit au Carnegie Hall, elle fait une tournée européenne. Elle signe un contrat chez CBS en 1954.
Elle devient alors une espèce d’icône. Elle chante à la maison Blanche pour les funérailles de Kennedy. Elle participe à la marche pour les droits civiques à Washington le 28 août 1963 où Martin Luther King a pris la parole et elle chante aux funérailles de ce dernier.
Quoi qu’on pense de la religion, Mahalia Jackson, qui est considérée comme la reine du gospel, incarne la fierté et la dignité des Noirs des Etats-Unis. 


5/ Albert Ammons &Pete Johnson
Et voici maintenant un genre qui appartient au blues et au jazz, le boogie-woogie. Nous avons déjà parlé dans Hot Ariège de celui que je considère comme le meilleur interprète de ce style au piano, Albert Ammons, même si d’autres, comme Pete Johnson ou Jimmy Yancey, pourraient contester cette appréciation. Mais en fait qui pourrait nier que la puissance des basses ambulantes d’Albert Ammons est irrésistible et inégalée ? Et quand les deux meilleurs, Albert Ammons et Pete Johnson réunissent leur talent, le résultat est forcément un chef d’œuvre.
La preuve par le document : on écoute un morceau intitulé Sixth Avenue Express.
La puissance d’Ammons et l’inventivité de Johnson, quel régal !
Ce morceau a été enregistré à New-York en 1941. Albert Ammons et Pete Johnson étaient accompagnés à la batterie par James F. Hoskins. Ce morceau figure dans une quantité innombrable de compilations dédiées au boogie-woogie.  


6/ Tom James
Et voici maintenant un tout autre style qui présente la même caractéristique de se situer à la jonction de deux genres, la country et le rockabilly. Nous allons écouter un chanteur guitariste du nom de Tom James. 
Tom James, c’est un peu comme Eddie Hope le bluesman dont on a parlé tout à l’heure, on ne sait pas grand chose de lui à part sa discographie. Il a commencé à enregistrer quatre titres en 1954 chez RCA Victor, apparemment à Nashville.
La seconde session a lieu en 1957 (ou en 1958, la date n’est pas connue avec exactitude), à Nashville, pour le label Klix. C’est cette session qui nous intéresse. Il enregistre un seul 45 tours, avec sur la face A Track Down Baby, qu’on écoutera dans une autre émission, et sur la face B Hey Baby, qu’on écoute tout de suite. 
Après la session pour Klix, Tom James enregistre en 1958 une session pour une autre marque de Nashville, Pleasant Valley, dont il sort un 45 tours.
Enfin, dans les années soixante-dix, Tom James a enregistré dans un registre plus country que rockabilly une session pour une marque qui était peut-être basée à Nashville, ce n’est pas sûr, Country Sound.
Et voilà, c’est tout ce qu’on sait sur Tom James. Ses morceaux pour le label Klix, dont Hey Baby qu’on a entendu, figurent sur le volume 5 du coffret intitulé « Rock-a-Billy Cowboys » édité par The Intense Media. Le coffret contient 10 CD, soit 250 morceaux en tout, excellents. Le titre du coffret est explicite : les morceaux font ressortir le lien très fort entre country et rockabilly.


7/ Tiny Bradshaw
Place maintenant au rhythm and blues avec le chanteur, compositeur, pianiste et batteur Tiny Bradshaw. Il est né en 1905 dans l’Ohio et il est mort en 1958.
En 1932, Tiny Bradshaw se fixe à New-York, où il joue de la batterie dans un groupe de jazz. C’est en 1934 qu’il forme son propre groupe avec lequel il enregistre 8 titres, toujours jazz. Il ne reprend les enregistrements que dix ans plus tard, en 1944, chez le label Manor et cette fois dans le style rhythm and blues. En 1947 il signe chez Savoy puis en 1949, chez King. 
Il reste chez King entre 1949 et 1955, c’est sa meilleure période. Il obtient un premier succès en 1950 avec Well Oh Well qui se classe numéro 2 au Billboard rhythm and blues. La même année, I’m Going To Have Myself A Ball, se classe en cinquième position. L’année suivante, en 1951, il récidive avec Walkin’ The Chalk Line, numéro dix. 
Son morceau le plus connu aujourd’hui date de la même année, 1951. Curieusement ce n’est pas un hit à l’époque, le morceau ne se classe pas au Billboard, le hit-parade du rhythm and blues. Ce morceau s’appelle The Train Kept A Rolling et s’il est si connu aujourd’hui, c’est parce qu’il a joué un rôle dans l’émergence du rock ‘n’ roll. On l’écoute.
On est en 1951 et c’est du rhythm and blues, mais la voix, le rythme martelé par une batterie d’enfer et le hurlement du saxo dans le break, tout cela annonce le rock ‘n’ roll. Outre le fait que ce morceau devenu un classique n’ait pas été un hit en son temps, on doit relever comme autre curiosité qu’il ait fait l’objet de nombreuses reprises de la part de groupes rock / pop comme les Yardbirds, Aerosmith ou Motorhead. Il se raconte que Jimmy Page, le leader de Led Zeppelin, le citait comme un des premiers morceaux qu’il ait joué. Le monde est fantastique et plein de mystères, cela en fait partie ! 
En 1953 Tiny Bradshaw obtient un nouveau succès avec Soft, numéro trois au Billboard, puis avec Heavy Juice, numéro neuf. Ensuite, Tiny Bradshaw connaît de sérieux ennuis de santé deux attaques cardiaques le laissent paralysé) et il ne fait pas, partie des gloires du rhythm and blues qui sont montés dans le wagon du rock ‘n’ roll. Il meurt peu après en 1958 à 53 ans.
Tiny Bradshaw reste comme une figure importante du rhythm and blues.


8Dickie Bishop
On change encore de style, on va retrouver du skiffle, ce genre musical anglais de la deuxième moitié des années cinquante, issu du mouvement « trad » initié par Chris Barber, entre autres, qui avait pris son essor au lendemain de la seconde guerre mondiale avec un revival européen du jazz Nouvelle Orléans.
Outre Chris Barber l’initiateur et Alexis Korner le pionnier militant de la cause du blues en Europe, la grande figure du skiffle est Lonnie Donegan, qui s’appelait en fait Tony Donegan et qui avait troqué son prénom contre celui de Lonnie en hommage au bluesman Lonnie Johnson. Lonnie Donegan a eu un grand succès en 1958 avec la reprise d’un morceau de Leadbelly, bluesman et folksinger des années trente quarante, Rock Island Line. Les adeptes du skiffle étaient friands de ce genre de morceaux, comme ceux de Woody Guthrie ou de Peete Seger. 
On va s’intéresser ici à Dickie Bishop , joueur de banjo et de guitare qui a remplacé en 1956 Lonnie Donegan dans le Chris Barber skiffle group, le groupe de Chris Barber. Dickie Bishop a enregistré avec ce groupe et plus tard rejoint la formation de Lonnie Donegan. Il a participé à l’album « Donegan on stage » qui est paru en 45 tours à 4 morceaux. Il forme ensuite son propre groupe et signe chez Decca qui a fait paraître quatre 45 tours. 
On écoute l’un de ces morceaux, Shorty George, un morceau crédité à Alan Lomax, célèbre ethnomusicologue producteur de Leadbelly et de Woody Guthrie qui jouait aussi de la guitare..  
Morceau disponible sur le CD intitulé « Great British Skiffle », volume 3 de la série « Just About As Good As It Gets » éditée par le label Smith & Co. 
Dickie Bishop n’a pas eu beaucoup de succès. Plus tard il a rejoué avec Chris Barber et Lonnie Donegan. 
L’histoire du skiffle est assez symptomatique de celle des revivals. Le skiffle britannique a d’ailleurs des points communs avec le blues revival américain qui démarre à peu près en même temps. Il n’y a pas d’avenir à rejouer les trucs du passé. Et les méchants ajouteraient : surtout en moins bien !
 D’une manière générale, mieux vaut écouter Leadbelly et Woody Guthrie que les artistes de skiffle, même si certains de ces derniers comme Dickie Bishop, ont fait des choses sympathiques. 
En fait le principal mérite du skiffle c’est d’avoir été l’une des sources du rock anglais qui émergera au début des années soixante. Les Shadows d’abord, puis les Beatles et les Rolling Stones, sont les héritiers de ce courant. 


9/ Detroit Junior
Retour au blues avec un chanteur pianiste, Detroit Junior. Son vrai nom est Emery H. Williams Jr, il est né en 1931 dans l’Arkansas et il est mort en 2005.
Il fait ses débuts dans un club du Michigan en 1950 sous le nom de Little Junior Williams. En 1951 il enregistre pour un petit label, Great Lakes. Je ne pense pas que ces morceaux aient été édités. En 1953 il forme son premier groupe, les Blue Chaps. En 1956 il se fixe à Chicago et fréquente J.T. Brown, Eddie Taylor, Little Mack Simmons.
En 1960 il enregistre pour la firme Bea & Baby. Il en sort un 45 tours, avec sur la face A Money Tree, qu’on écoutera prochainement, et sur la face B So Unhappy Detroit Jr  qu’on écoute tout de suite.
Detroit Junior est au chant et au piano, Eddie King à la guitare, Bob Anderson à la basse et Robert Whitehead à la batterie. Le critique Gérard Herzhaft mentionne aussi Little Mack Simmons et Eddie King au chant, mais comme sur ce morceau on n’entend qu’un seul chanteur, je pense que ces autres voix ne font partie que de l’ensemble présent sur la face A du 45 tours, Money Tree.
L’année suivante, en 1961, Detroit Junior forme un nouveau groupe. Il enregistre pour Chess, Foxy, Palos, C.J., USA, Tip-Top. A partir de 1967, il devient le pianiste attitré de Howlin’ Wolf jusqu’en 1975, date à laquelle la maladie contraint le loup hurlant à l’inactivité.
Detroit Junior travaille alors avec les autres costauds de Chicago James Cotton, Little Mack Simmons, Jimmy Reed.  En 1971 il enregistre un album pour Blues On Blues. Par la suite il sortira des albums chez Alligator, Blue Suit, Sirens Records et Delmark. 
Detroit Junior est un solide pianiste de Chicago, dont le jeu se rapproche de celui d’Otis Spann, le pianiste vedette de Muddy Waters. Il a travaillé avec brio avec les plus grands.


10/ Hal Paige
Et nous passons à du rhythm and blues new-yorkais avec Hal Paige. Il est difficile de trouver des renseignements sur Hal Paige qui est pourtant l’auteur d’une discographie abondante et plusieurs de ses morceaux se retrouvent sur des compilations diverses dédiées soit à des marques, soit au blues de New-York, soit au rhythm and blues.
Il semble qu’il ait débuté chez Atlantic. C’est ce label qui édite deux 45 tours, le premier en 1953 avec Drive It Home et Break Of Day Blues, le second en 1954 avec Big Foot May et Please Say You Do.  
Il enregistre ensuite pour Paradise en 1955 puis pour J & S en 1957. Il passe ensuite chez Fury, la marque de Bobby Robinson, pour lequel il enregistre dès 1957. C’est en 1959 pour Fury encore qu’il grave le morceau qu’on va écouter : Going back To My Hometown.
Curieusement le nom du groupe de Hal Paige, The Wailers, s’orthographie de façon différente suivant les marques et les auteurs. On trouve parfois « The Wailers », comme pour le groupe de Bob Marley, les pleurnicheurs ; on trouve aussi « The Whalers », les baleiniers, ce qui n’a franchement aucun rapport et est plutôt étrange.
Les vinyls originaux de chez Fury mentionnent « The Whalers », les baleiniers. C’est la bonne orthographe. Charlie Gillett, auteur d’une splendide histoire du rock ‘n’ roll donne aussi cette bonne orthographe dans son bouquin. Il s’agit donc probablement d’une erreur grossière de certaines marques qui ont réédité les titres plusieurs décennies plus tard sans vérifier.
Voilà ce que je pouvais dire sur Hal Paige qualifié par Charlie Gillett de très bon chanteur inconnu auteur d’excellentes chansons de rhythm and blues. C’est son avis et je le partage !



Vous pouvez écouter les morceaux présentés ici en cliquant sur le titre de la chanson en ROUGE

Vous Pouvez écouter "Hot Ariège" en direct les mercredis a 19h sur Radio Transparence :

https://www.radio-transparence.org/


Merci pour votre visite & Bon Blues !!

mercredi 11 juillet 2018

Séance 33


HOT ARIEGE
Du swing, des blue notes et du rythme
Avec Bruno Blue Boy !


Séance 33 


1/ Bukka White
On commence avec du blues : le chanteur guitariste Bukka White. Son vrai nom est Booker T. Washington. Il est né dans le Mississippi en 1909 et il est mort en 1977.
Au début des années vingt, Bukka White mène une vie errante dans le Delta du Mississippi où il rencontre le légendaire Charley Patton, pionnier du blues du Delta. Il grave ses premiers disques pour Victor en 1930 et continue son existence vagabonde. En 1937 il réalise une session d’enregistrement pour Vocalion et remporte un succès avec Shake ‘Em On Down. Il est condamné pour tentative de meurtre, incarcéré à Parchman Farm (ce sera le nom d’un de ses morceaux les plus brillants).
C’est l’infatigable chercheur ethnomusicologue Alan Lomax qui le retrouve dans cet établissement et en 1939 il grave deux faces pour la Bibliothèque du Congrès. Il est libéré peu après grâce à l’intervention du producteur de Chicago Lester Melrose et en 1940 il réalise une session avec Washboard Sam d’où est tiré le morceau qu’on va entendre, Aberdeen Mississippi Blues. 
Bukka White au chant et à la guitare, Washboard Sam au washboard.
En 1947 Bukka White héberge un temps son petit cousin B.B. King à qui il aurait offert sa première guitare. Mais comme le succès commercial n’est pas au rendez-vous, il abandonne la musique pour se faire brocanteur. Il repasse même par la case prison. C’est la reprise d’un de ses morceaux des années trente, Fixin’ To Die, par le jeune Bob Dylan en 1962 qui lui permet de se relancer.
Bukka White a gravé de nombreux albums, il a participé à la tournée de l’American Folk Blues Festival en 1967 et à de nombreux festivals.
Le critique Gérard Hertzhaft écrit que son style marie le rythme syncopé du delta blues et l’influence des musiques rurales blanche et hawaïenne. Avec sa guitare métallique National, son bottleneck est puissant. C’est un grand bluesman.


2/ Eddie Boyd
On reste dans le blues mais avec un pianiste, Eddie Boyd. Edward Riley Boyd est né au cœur du Delta du Mississippi, près de Clarksdale comme John Lee Hooker, en 1914 et il est mort en 1994. 
Eddie Boyd s’est d’abord fixé à Memphis en 1936. Il joue dans les clubs et en 1938 il forme un orchestre, les Dixie Rhythm Boys. C’est en 1941 qu’il émigre à Chicago. Il est choisi par RCA Victor pour doubler le pianiste vedette de l’époque, Big Maceo, frappé d’hémiplégie. Il devient rapidement le pianiste régulier de John Lee Sonny Boy Williamson entre 1942 et 1948. Il enregistre ses premiers disques pour Victor en 1947 mais il se fait jeter par Chess qui manque de flair sur ce coup-là 
C’est pour une petite marque, JOB, qu’il grave en 1952 Five Long Years qui atteint la première place au classement rhythm and blues du Billboard, ce qui est rarissime pour un morceau de blues pur. Il reste quinze semaines dans les charts. 
L’énorme succès de Five Long Years a dû faire réfléchir Chess puisque cette fois la maison Chess fait signer un contrat à Eddie Boyd et le fait abondamment enregistrer. On écoute un morceau tiré du premier 45 tours enregistré en 1952  pour Chess intitulé Rosa Lee Swing qui est une reprise d’un morceau déjà enregistré pour Victor en 1947. Eddie Boyd est au chant et au piano, Robert « Little Sax » Crowder au saxo ténor, Robert Jr Lockwood à la guitare, Alfred Elkins à la basse et Percy Walker à la batterie.
Sur le deuxième 45 tours publié par Chess en 1953 figure 24 Hours qui atteint la dixième place au Billboard. Eddie Boyd aura d’autres succès encore : Third Degree, Please Help Me, I’m A Prisoner 
Il a un grave accident de voiture en 1957. Chess ne renouvelle pas son contrat. Après une période d’inactivité forcée, il enregistre pour de petites marques, sans succès. Sa popularité est en baisse, il se fait alors fermier. C’est le blues revival des années soixante qui va le ramener au blues. En 1965, il est le pianiste de la tournée de l’American Folk Blues Festival. En 1967 il revient en Europe et s’établit en Finlande à Helsinki où il se produira jusqu’à la fin de sa vie.
Pour les amateurs je recommande les deux CD publiés par EPM Blues Collection sous le titre « Eddie Boyd The Complete Recordings » avec comme sous-titre pour le premier volume « 1947-1950 » et pour le second « 1951-1953 ». 


3/ Percy Sledge
Et nous allons parler soul music à présent avec le chanteur Percy Sledge. Percy Sledge est né en 1940 et il est mort en 2015. Originaire de Louisiane, c’est en Alabama qu’il passe son enfance.
Percy Sledge a débuté dans le rhythm and blues avec le groupe des Esquires en 1965. C’est dès l’année suivante qu’il enregistre sous son nom pour la marque Atlantic son plus grand tube, un morceau qui fait date dans l’histoire de la soul music : When A Man Loves A Woman. Je vous propose de l’écouter.
Enorme hit numéro 1 au classement du rhythm and blues et numéro 1 au Billboard Hot 100,  énorme succès mondial, premier disque d’or pour la marque Atlantic. A tel point qu’Atlantic n’a pas le temps de s’organiser pour lui faire produire un deuxième tube qu’il est déjà racheté par ABC Paramount.
Les majors, ces grandes compagnies qui dominent le marché, veillent au grain. Dès qu’une vedette pointe le nez chez une marque indépendante, elles la rachètent au prix fort. Elles font ainsi coup double : elles encaissent les bénéfices des tubes suivants du chanteur et elles asphyxient petit à petit les compagnies indépendantes. 
Et justement, les tubes, Percy Sledge les enchaîne : Warm And Tender Love, It Tears Me Up, Take Time To Know Her… Dans les années soixante-dix sa popularité décline mais il parvient encore à classer deux morceaux dans les charts : I’ll Be Your Everything et Sunshine.  
Il connaît ensuite un creux qui est le lot de la plupart des artistes de soul music. Il parviendra néanmoins à rebondir dans les années quatre-vingt, quatre-vingt-dix. Son dernier album est sorti en 2004.
Percy Sledge est une figure majeure de la soul music.


4/ Mad Dog Lester Davenport
Voici maintenant un harmoniciste de blues, Mad Dog Lester Davenport. Lester Davenport le chien fou est né en 1932 dans le Mississippi et il est mort à Chicago en 2009.
C’est en 1946 qu’il arrive à Chicago, il n’a que quatorze ans. Il s’intègre à la scène locale du blues ; il joue avec des bluesmen comme Snooky Pryor, Homesick James. Il remplace Billy Boy Arnold quand ce dernier quitte l’orchestre de Bo Diddley pour entamer une carrière personnelle. Mad Dog est notamment présent sur une session enregistrée pour Chess en 1955 par Bo Diddley.
Dans les années soixante il forme son groupe. Il est peintre en bâtiment le jour, il joue du blues la nuit. C’était très courant à Chicago dans ces années-là. 
Son premier album paraît chez Blue Sting en 1992. Il en sortira un deuxième dix ans plus tard chez Delmark en 2002 et c’est tout.
On écoute un morceau intitulé Ain’t It Nice tiré d’une compilation de la marque Delmark, « This Is The Blues Harmonica ». Ce morceau doit en fait être crédité à Willie Kent qui chante et tient la basse.
Morceau de 1991. Mad Dog Lester Davenport est à l’harmonica, Willie Kent au chant et à la basse, Luther Slim Adams à la guitare, Jacob Dawson deuxième guitare et Timothy Taylor à la batterie.   
Mad Dog Lester Davenport est présent sur plusieurs compilations de blues.


5/ Lottie Kimbrough
On reste dans le blues mais voici maintenant une chanteuse, Lottie Beaman. Son vrai nom est Lottie Kimbrough. On ne connaît pas exactement ses dates de naissance et de décès. Elle est née vraisemblablement à la fin du dix-neuvième siècle, un peu avant 1990. On n’est pas sûr non plus de son lieu de naissance : c’est soit dans l’Arkansas, soit à Kansas City.
En tout cas, c’est à Kansas City qu’elle commence sa carrière musicale, au début des années vingt. Elle joue dans les clubs de la ville. On la surnomme « The Kansas City Butterball », la rondouillarde de Kansas City.
Ce qui est connu de sa vie, c’est qu’elle a enregistré entre 1924 et 1929. Il semble aussi qu’elle ait pas mal bourlingué. Elle a réalisé sa première session pour Paramount, mais elle a enregistré pour de nombreux labels, Merrit, Gennett, Champion, Supertone, Superior. 
On écoute son morceau le plus connu, Rolling Log Blues, enregistré en 1929 à Kansas City pour le label Gennett. Elle est accompagnée à la guitare par Miles Pruitt. 
Ce morceau est devenu un classique du blues et du folk. Il a été repris par le bluesman Son House, un grand nom du blues du Delta, et par Jo-Ann Kelly, Buffy Sainte-Marie ou encore Eric Bibb.
Il figure sur le coffret de deux CD édité par Frémeaux intitulé « Women In Blues, New York Chicago Memphis Dallas 1920-1943 ». Ce coffret consacré aux chanteuses de blues est remarquable. 


6/ Rockin’ Dopsie
On change se style : Rockin’ Dopsie est un chanteur accordéoniste de zydeco. C’est un gaucher et il joue à l’envers. Son vrai nom est Alton Jay Rubin. Il est né, en Louisiane évidemment, en 1932 et il est décédé en 1993.
Son nom de scène s’orthographie Dopsie, et parfois Dupsee, sans doute pour une histoire de contrats avec les maisons de disques. Il joue dans les clubs de Lafayette à partir du milieu des années cinquante. Il enregistre pour des labels indépendants, mais le zydeco ne décollera qu’à partir des années soixante, principalement grâce aux efforts de Clifton Chenier.  
Et Rockin’ Dopsie se fait d’abord connaître en Europe. Il enregistre son premier album pour Sonet, un label suédois, en 1976. On ne s’intéressera à lui aux Etats-Unis que dans les années quatre-vingt. 
On écoute un morceau enregistré pour Jay Miller, Everyday I Have The Blues.
Rockin’ Dupsee - Everyday I Have The Blues
Rockin’ Dopsie enregistre pratiquement un album chaque année jusqu’en 1991. Peu à peu, il s’est fait un nom. Il est maintenant considéré comme une figure importante du zydeco.
A noter que son fils continue son groupe qui s’appelle à présent Rockin’ Dopsie Jr & The Zydeco Twisters. 


7/ Roy Milton
Et nous allons parler maintenant d’une grande figure du rhythm and blues, Roy Milton. Roy Milton est un chanteur, batteur, chef d’orchestre né en 1907, décédé en 1983. D’origine indienne, il a passé son enfance dans une réserve d’Oklahoma.
Il commence sa carrière à la fin des années vingt. Il forme son propre groupe, les Solid Senders, en 1933, avec notamment la remarquable pianiste Camille Howard. Il sort son premier disque, Milton’s Boogie, sur son propre label au début des années quarante. 
Le succès arrive en 1945 avec le morceau R.M. Blues, enregistré pour le label Juke Box. Le titre atteint la deuxième place au classement du rhythm and blues. On l’écoute.
R.M. Blues  est un standard du blues et du rhythm and blues dont on ne compte pas les reprises. Le succès du morceau a permis de faire décoller non seulement la carrière de Roy Milton mais aussi le label rebaptisé Specialty. A noter que Roy Milton a enregistré d’autres versions de R.M. blues, dont une en public avec Johnny Otis.
Roy Milton était extrêmement populaire dans les années quarante cinquante. Il place 19 morceaux dans le Top Ten du Billboard, le classement du rhythm and blues entre 1945 et 1953, c’est-à-dire en moins de dix ans !
En revanche sa popularité décline à la fin des années cinquante. La raison en est simple : il fait partie de ces gloires du rhythm and blues qui ne sont pas parvenues à monter dans le wagon du rock ‘n’ roll. Il aura essayé d’ailleurs, on écoutera dans d’autres émissions de Hot Ariège certains de ses morceaux de 1956 / 1957, mais sans véritable succès.


8/ Elvis Presley
Voilà, et du rock ‘n’ roll on va en parler, avec le King, Elvis Aaron Presley ! 
Nous avons déjà retracé la carrière d’Elvis Presley dans de précédentes émissions de Hot Ariège. Mais j’avais mis l’accent sur le démarrage de sa carrière et ses prestations pour la maison Sun de Memphis.
La firme RCA Victor a racheté Elvis Presley à la maison Sun dans le courant de l’année 1955 pour la somme de quarante mille dollars, ce qui à l’époque était faramineux. RCA Victor est une major, il n’y a plus de place pour l’improvisation ou le bricolage : les artistes sont formatés pour vendre. 
Pas question évidemment de laisser Elvis interpréter librement des blues. Il est pris en main. Le couple infernal Jerry Leiber et Mike Stoller est mobilisé pour composer ses chansons. C’est notamment le cas pour la chanson créée spécialement pour le film de Richard Thorpe sorti en 1957, Jailhouse Rock. 
Le titre de la chanson, qui porte le nom du film, le rock du bagne, est resté sept semaines numéro 1 au Billboard Hot 100, c’est-à-dire le classement des meilleures ventes de disques, tous genres confondus. On l’écoute.
Evidemment la fraîcheur, la spontanéité et l’authenticité de la période Sun ont disparu et le morceau fait apparaître une certaine lourdeur orchestrale mais, bien sûr, c’est encore un super morceau de rock ‘n’ roll. 
L’année 1957 est encore une bonne année de rock ‘n’ roll pour Elvis Presley. Les choses se gâteront par la suite et la catastrophe se produira en 1960 à son retour du service militaire où l’industrie aura réussi à transformer complètement un jeune amateur de blues en une espèce de crooner « brillantiné » servant de la guimauve.  


9/ Alvin Smith
Nous quittons à présent le rock ‘n’ roll pour revenir au blues. Voici du blues californien avec Alvin Smith, connu également sous le nom de Al King. Alvin Smith est né en Louisiane en 1923 et il est mort en 1999. 
Alvin Smith a enregistré à partir du début des années cinquante pour une quantité de petits
labels : Music City, Irma, Christy, Art-Tone. Il a enregistré aussi pour son propre label, Flag.
Son morceau le plus connu date de 1964. Il s’agit de On My Way, qu’on trouve aussi sous le nom de I’m On My Way, un morceau présent sur de nombreuses compilations. On l’écoute.
Alvin Smith a décroché un seul hit, sous le nom de Al King, en 1966 avec le morceau Think Twice Before You Speak. Sage conseil, il est vrai qu’il vaut mieux réfléchir deux fois avant de causer !
En tout cas, ce morceau classé au Billboard lui permet d’enregistrer pour des firmes comme Modern et Kent. Son dernier 45 tours est paru en 1970 et après il a arrêté.


10/ Muddy Waters
Et c’est maintenant un géant du blues qu’on va écouter : Monsieur Mac Kinley Morganfield, plus connu sous le nom de Muddy Waters. Muddy Waters est l’un des principaux fondateurs du blues de Chicago d’après-guerre, et même du blues moderne en fait.
Son truc est simple : il a adapté le blues traditionnel du Delta, le blues de Charley Patton, de Robert Johnson et de Son House, à la guitare électrique, ce qui donne un effet saisissant. Autre caractéristique majeure : tous les musiciens qui ont défilé dans son orchestre pendant trente ou quarante ans sont devenus des célébrités du blues, voire même des géants à leur tour, je pense en particulier à l’harmoniciste Little Walter. Alors évidemment quand vous jouez une musique originale, superbe, avec des musiciens d’exception, vous produisez forcément des chefs d’œuvre à la chaîne.
 Je vous propose d’écouter un morceau de 1964 pour la maison Chess, la maison de Muddy Waters, You Can’t Lose What You Ain’t Never Had, qui traduit une logique imparable : vous ne pouvez pas perdre ce que vous n’avez jamais eu.
Muddy Waters est au chant et à la guitare, Otis Spann au piano, soit Tat Harris soit Luther Tucker à la guitare, James Cotton à l’harmonica et Francis Clay à la batterie. 
La renommée de Muddy Waters s’étend largement au-delà des amateurs de blues pour plusieurs raisons, outre ses qualités musicales et son rôle essentiel dans l’histoire du blues. 
Muddy Waters, suivant l’exemple de Big Bill Broonzy, est l’un des premiers bluesmen à être venu en Europe. Sa tournée en Angleterre en 1958, où il a joué avec des musiciens comme Chris Barber, Alexis Korner ou Cyril Davies, a été véritablement initiatique. Il a révélé le blues à une génération. Et plus précisément : le blues électrique, alors que Big Bill n’utilisait qu’une guitare acoustique. Cela a été comme un détonateur. Ce n’est pas un hasard si les Rolling Stones ont choisi le nom de leur groupe en référence à une chanson de Muddy Waters. Dès lors, l’aura de Muddy Waters a été énorme et c’était pleinement justifié !


Vous pouvez écouter les morceaux présentés ici en cliquant sur le titre de la chanson en ROUGE

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