mercredi 5 décembre 2018

Séance 53


HOT ARIEGE
Du swing, des blue notes et du rythme
Avec Bruno Blue Boy !



Séance 53 


1/ Jimmie Rodgers,  1897-1933
Jimmie Rodgers (Jimmie avec ie à la fin et non y et Rodgers avec un d avant le g), né en 1897, mort en 1933 a été la première star de la country music. Dès l’âge de 13 ans, il Rodgers travaille sur les voies de chemin de fer où il côtoie des Noirs et il s’imprègne de blues. 
Sa marque de fabrique, c’est la tyrolienne, appelée yodel dans sa version suisse. Ce sont sans doute des émigrés d’origine germanique qui ont importé dans la country music cette façon de faire des vocalises par onomatopées en alternant une voix de poitrine et de falsetto, via la musique des Appalaches, une chaîne montagneuse de l’est des Etats-Unis où s’est développée la musique populaire folklorique qui est à l’origine de la country. 
Il a fait ses débuts professionnels sur des stations de radio et il a commencé à enregistrer en 1927 pour le label Victor. Son morceau fétiche, Blue Yodel, l’a rendu instantanément célèbre. Le disque s’est vendu à près de cinq cent mille exemplaires. Cela lui a valu le surnom de « Blue Yodeler », en plus de ceux de « The Singing Brakeman », le chef de train chantant, titre donné à un court métrage réalisé pour Columbia Pictures, et de père de la country music.   
On écoute un morceau de 1929 intitulé Jimmie’s Texas Blues. 
Jimmie Rodgers est resté une légende. Il est l’un des créateurs de la country qui a émergé dans les années vingt. Sa musique est le résultat d’une combinaison personnelle entre le blues et la musique des Appalaches. Sa contribution à l’évolution de la musique du vingtième siècle est considérable. Son œuvre est immense. La tuberculose l’a emporté bien trop tôt en 1933 mais son nom est à retenir : Jimmie Rodgers, le père de la country music.



2/ Little Walter, 1931-1968 
Little Walter, Marion Walter Jacobs de son vrai nom,  n’est pas né dans le Mississippi mais en Louisiane. C’est l’une des stars du Chicago blues, un génie de l’harmonica, un immense créateur qui a eu une influence considérable. Il a joué de l’harmonica dès l’âge de huit ans, il débute dans des clubs de la Nouvelle Orléans à 12 ans et il arrive à Chicago en 1947. Il est engagé par Muddy Waters l’année suivante, en 1948. Son disque Juke obtient la première place au Billboard en 1952. C’est le départ pour sa carrière en solo. Il enregistre abondamment et pendant quatre ans il accumule les succès : Sad Hours, Mean Old World, Blues With A Feeling, You’re So Fine, My Babe... 
A partir de 1956, sa popularité commence à décroître bien qu’il soit toujours au top niveau. La preuve par le son : on écoute un morceau paru chez Chess en 1960, Just Your Fool. 
Little Walter au chant et à l’harmonica, Otis Spann au piano, Luther Tucker et Fred Robinson à la guitare, Willie Dixon à la basse et Fred Below à la batterie.
A partir de 1964, Little Walter se produit essentiellement en tournée. Il meurt dans une bagarre de rue à Chicago en 1968. Eh oui, très souvent la durée de vie des bluesmen a été limitée.
Little Walter fait partie des géants du blues, de cette dizaine d’artistes qui ont dominé le blues d’après-guerre. Il est avec John Lee Sonny Boy Williamson et Muddy Waters l’un des artisans du Chicago blues moderne. Il est aussi l’auteur d’un grand nombre de standards. On ne compte plus les reprises de ses morceaux. Comme celui qu’on vient d’entendre, Just Your Fool, qui figure sur le dernier disque des Rolling Stones. Il n’est pas exagéré de dire que son jeu à l’harmonica a changé le monde du blues.


3/ Mississippi Fred McDowell, 1904-1972 
Fred McDowell est né en 1904 dans le Tennessee, il est mort en 1972. Bien qu’il n’ait pas été enregistré avant guerre, il fait partie des grands bluesmen du Delta du Mississippi. Il a exercé différents métiers, poseur de traverses, ouvrier tonnelier, ouvrier agricole. Ce n’est qu’en 1940 qu’il a assez de fric pour s’acheter une guitare. Il anime alors des soirées et des bals du samedi soir. Il n’a été découvert qu’en 1959 par l’ethnomusicologue Alan Lomax qui l’a enregistré.  
Mississippi Fred McDowell signe chez Atlantic et Prestige. On écoute un de ces morceaux de 1959, Shake ‘Em On Down.
Mississippi Fred McDowell a enregistré de nombreuses versions de ce morceau. Celle qu’on vient d’entendre date de 1959, l’année de sa découverte. Shake ‘Em On Down est un grand classique du blues qui a été interprété par Tommy McClennan, Big Bill Broonzy, Bukka White et bien d’autres.
C’est en 1964 que Mississippi Fred McDowell connaît la consécration avec la publication de deux super albums que je recommande vivement aux amateurs : « My Home Is On The Delta » et « Mississippi Delta Blues ». Par la suite Fred McDowell devient l’une des grandes figures du blues revival des années soixante. Il participe à des festivals. Il vient en Europe en 1965 avec l’American Folk Blues Festival. 
Mississippi Fred McDowell tire des sons incroyables de sa guitare avec son bottleneck. C’est un des maîtres du slide du Delta.


4/ Little Hat Jones, 1899-1981 
Chanteur guitariste du Texas. Il a travaillé à la ferme, puis sur des chantiers où il a récolté son surnom de « Little Hat », petit chapeau, parce qu’il bossait avec un chapeau déchiré.
Il a réalisé trois sessions pour Okeh : deux en 1929 et une en 1930. Lors de la première session de 1929, en plus des deux morceaux qu’il a gravés sous son nom, il a accompagné à la guitare le chanteur Texas Alexander sur neuf morceaux.
On écoute un morceau issue de la troisième session réalisée le 14 juin 1930, Bye Bye Baby Blues. 
Morceau tiré d’une compilation JSP « Texas Blues 1927-1937 ». Il a également été édité par le label Document sous le titre « Texas Blues, 1927-1935 ». Ce label a fait paraître énormément de morceaux d’avant guerre. La qualité n’est pas toujours au top mais la plupart ses morceaux sont intéressants.
Little Hat Jones est très peu connu, même des amateurs de blues. Pourtant cette chanson a été utilisée pour un film paru en 2001, « Ghost World », de Terry Zwigoff.
Little Hat Jones n’a plus rien enregistré après 1930. Il jouait dans des soirées et des juke joints. Il n’a pas profité du blues revival des années soixante. Je n’en connais pas la raison. Est-ce que les chercheurs ne se sont pas intéressés à lui ou bien était-il malade, fatigué ? En tout cas, c’est dommage. Il est mort en 1981.


5/ Roy Happy Easter & Preston Love
Le plus connu des deux, c’est Preston Love né dans le Nebraska en 1921, décédé en 2004. Preston Love était un saxophoniste et un chef d’orchestre. Il a commencé comme saxophoniste à l’ère des big bands. Au début des années quarante, il joue dans des orchestres, dont certains sont prestigieux comme ceux de Count Basie ou de Lucky Millinder.
Il devient ensuite chef de son propre orchestre, jouant avec Billie Holiday, Wynonie Harris, Johnny Otis. En 1952, il a fondé sa boîte de disques, Spin Records.
On écoute un morceau de 1956 enregistré pour le label Ultra où le chanteur est donc Roy Happy Easter, dont on ne sait à peu près rien, sinon qu’il a fait un 45 tours, et un seul, avec le Preston Love Orchestra. Le morceau s’appelle If You Ever Get Lonesome.
Ce morceau figure sur une compilation éditée par Ace intitulée « DIG This Blues, The Legendary DIG Masters », volume 2 ; DIG étant le nom d’un label fondé par Johnny Otis qui à l’origine s’appelait Ultra.
Dans les années soixante, l’orchestre de Preston Love est devenu l’orchestre de studio du label Motown et il a accompagné les artistes de renom de la marque comme les Temptations, Marvin Gaye et autres.


6/ Doctor Clayton, 1898-1947
Peter Joe Clayton était chanteur et non docteur ; « doctor », c’était juste un surnom. Il prétendait être né en Afrique mais non, il était né en Géorgie. Dans les années trente il a vécu à Saint-Louis, il bossait en usine. 
En 1935, il grave 6 faces pour Bluebird qui n’en publie que deux. En 1940, sa femme et ses quatre enfants meurent dans un incendie. Il se rend alors à Chicago avec Robert Jr Lockwood. En 1941-1942, il enregistre pour Bluebird et Okeh.
On écoute son morceau le plus connu, Pearl Harbor Blues, enregistré quelques mois seulement après les événements pour Bluebird. Il faut rappeler que le président Roosevelt s’était fait élire sur un programme de non intervention dans le conflit mondial. C’est le bombardement surprise de la base navale de Pearl Harbor par l’aviation japonaise le 7 décembre 1941 qui a provoqué l’entrée en guerre des Etats-Unis et non l’idée qu’il fallait libérer l’Europe du joug nazi.
J’ai allumé ma radio
J’ai entendu M. Roosevelt dire
Que nous voulions rester en dehors de l’Europe
Mais que maintenant nous avions tous une dette à payer
Doctor Clayton au chant, Blind John Davis au piano, Ransom Knowling au tuba et Alfred Elkins à la contrebasse. Il s’agit de la version de 1942 pour Bluebird, Doctor Clayton en a gravé une autre en 1946 pour RCA.
Doctor Clayton n’a jamais obtenu de grand succès mais il était très populaire à Chicago et plusieurs de ses compositions ont été reprises par des musiciens de blues, notamment par B.B. King pour lequel il était une référence.


7/ Carl Perkins, 1932-1998
Carl Perkins était un chanteur guitariste découvert par la maison Sun, comme Elvis Presley, qui avait tout pour succéder au king. Mais ce fut un artiste maudit : cela ne s’est pas passé comme cela aurait dû.
Ce sont les disques d’Elvis qui attirent Carl Perkins dans les studios Sun dès 1954. Ses premiers enregistrements sont des ballades dans un style country. Mais Sam Phillips, le producteur de la maison Sun, pousse Car Perkins vers le rock ‘n’ roll. En décembre 1955, Perkins enregistre un morceau qui est devenu un standard du genre, Blues Suede Shoes, qu’on a écouté lors d’une précédente émission. Blues Suede Shoes est le premier morceau à figurer parmi les meilleurs classements des trois hits parades du Billboard (première pour la country et le rhythm and blues, deuxième pour la pop). La face B du disque, Honey Don’t, est également un morceau incroyable de rockabilly. On l’écoute.
Carl Perkins n’a pas eu de bol : un accident de voiture l’a empêché de participer à  une émission de télé extrêmement populaire et c’est de son lit d’hôpital qu’il a assisté à la prestation de Presley qui a repris son hit Blue Suede Shoes dans son show. Carl Perkins est hors jeu en ce moment décisif de l’année 1956 où sont apparues les stars du rock ‘n’ roll. Cette absence est décisive pour la suite de sa carrière. 
Plus tard, Carl Perkins cédera à l’alcoolisme et au découragement. Il abandonne même le métier. C’est une rencontre avec Johnny Cash qui lui a donné le goût de se remettre dans le bain en revenant à la country music. Carl Perkins reste à mon sens l’un des plus grands artistes de l’histoire du rock ‘n’ roll.


8/ Trudy Lynn
Trudy Lynn est une chanteuse de blues et de soul née au Texas en 1947. Sa carrière professionnelle a démarré dans les années soixante. Elle a commencé en chantant avec Albert Collins. Son répertoire s’est ensuite orienté vers le rhythm and blues. Dans les années soixante- dix, elle se produisait dans des clubs à Houston.
Elle a commencé à enregistrer des albums tardivement, en 1989, chez Ichiban Records. Ses deux premiers albums pour ce label ont été classés au Billboard. Elle en a fait trois autres pour la même marque. Elle a ensuite fait plusieurs autres maisons de disques.
Depuis 2013, elle sort régulièrement des albums édités chez Connor Ray Music. Le premier, intitulé « Royal Oaks Blues Café », a atteint la première place au Billboard. 
Je vous propose d’écouter un morceau tiré de son avant-dernier album paru en 2016, « I’ll Sing The Blues For You ». Le morceau s’appelle If It’s News To You. 
Un morceau qui sonne bien blues. Trudy Lynn est un bon exemple de ce qui se fait de mieux aujourd’hui et qui associe souvent blues et soul.
Son dernier album est paru en 2018.


9/ Pete Mayes, 1938-2008
Chanteur guitariste né à Double Bayou, une petite ville du Texas. Il n’a jamais eu de grand succès, il a enregistré tardivement ; en fait, la musique ne lui permettait pas d’être musicien à plein temps et toute sa vie il a occupé des emplois comme peintre ou employé dans un ranch.
Dans les années cinquante, il joue dans la salle de danse locale. Il a aussi formé un groupe puis joué avec des bluesmen comme Lowell Fulson, Big Joe Turner, Percy Mayfield, Bill Doggett, Junior Parker, des musiciens de jazz aussi.
Il grave son premier 45 tours en 1969 pour le label Ovide, avec lequel il en fera deux autres par la suite. Dans les années soixante-dix, il fait des tournées. En 1983 il hérite de la salle de danse locale. Il enregistre son premier album en 1986 pour un label hollandais, Double Trouble. 
On écoute un morceau tiré du deuxième album paru également en 1986 chez Double Trouble, « I’m Ready ». Le morceau s’intitule Crazy Woman.  
Pete Mayes - Crazy Woman
Blues sophistiqué, guitare mélodieuse, voix claire, Pete Mayes se range délibérément dans un style hérité de T-Bone Walker et de la Californie.
Pete Mayes a sorti un troisième album, « Pete’s Sake », chez Antone Records. Ce fut son dernier. 


10/ Smokey Wilson, 1936-2015
Robert Lee Wilson est un chanteur guitariste né dans le Mississippi, il a grandi dans l’Arkansas et a passé sa vie sur la côte ouest. Son jeu est celui d’un musicien originaire du Delta.
Smokey Wilson arrive à Los Angeles en 1970. Il ouvre un club où il joue comme leader. Il réalise ses premiers enregistrements en 1977, 1978, pour le label Big Town. Il sort des 45 tours et deux albums. 
En 1983 il sort chez Murray Brothers un album intitulé « 88th St. Louis Blues ». On écoute un morceau de cet album, qui s’appelle I Got Something On You Baby. 
Dans les années quatre-vingt, Smokey Wilson joue en club et dans des festivals. Dans les années quatre-vingt-dix, il sort un album environ tous les deux ans pour divers labels : Bullseye Blues, Rounder, P-Vine. 
Il a obtenu tardivement une reconnaissance nationale, à la fin des années quatre-vingt-dix, sans décrocher de hit au Billboard, mais grâce à des passages à la télévision.
Il est décédé en 2015.


Bonus track :

11/ Billie Holiday, 1915-1959
Une chanteuse de jazz, Billie Holiday, qui aura drôlement galéré dans sa vie dès le départ. Née en 1915, plus ou moins abandonnée par ses parents, elle est envoyée en maison de redressement, un monde de violence et de viol, elle connaît la prostitution, la prison et les drogues dures. Elle était sans arrêt sous la coupe d’escrocs qui la terrorisaient. Sans parler du racisme bien sûr, qui faisait qu’une femme noire ne pouvait pas chanteur au milieu d’un orchestre blanc dans les années trente, quarante. Elle devra écourter une tournée avec l’orchestre d’Artie Shaw parce qu’elle n’était pas acceptée dans les hôtels avec les Blancs.
C’est dans ce contexte extrêmement dur qu’elle a produit des morceaux splendides. Grâce au critique producteur  John Hammond elle a pu enregistrer à partir de 1933 pour Columbia. Son véritable succès démarre à partir de 1935, elle devient une vedette du jazz new-yorkais. 
On écoute un morceau enregistré en 1940 qui est un grand classique du jazz, St. Louis Blues. Billie Holiday est accompagnée par l’orchestre de Benny Carter avec Bill Coleman à la trompette, Benny Morton au trombone, Benny Carter à la clarinette, George Auld au saxo ténor, Sonny White au piano, Ulysses Livingston à la guitare, Wilson Myers à la basse et Yank Porter à la batterie.
Billie Holiday a connu bien des hauts et des bas aussi. Elle a chanté avec les plus grands orchestres de jazz, avec Louis Armstrong, Duke Ellington, Count Basie etc. Sa tournée européenne de 1954 lui a fait un bien fou. Malgré les coups durs, l’alcool et la drogue, elle a chanté jusqu’à la fin de sa vie.
Le saxophoniste Lester Young l’avait surnommée Lady Day. C’était en effet une Lady, une grande dame du jazz, dotée d’une voix et d’un sens du feeling et du swing exceptionnel.


Vous pouvez écouter les morceaux présentés ici en cliquant sur le titre de la chanson en ROUGE

Vous Pouvez écouter "Hot Ariège" en direct les mercredis a 19h sur Radio Transparence :

https://www.radio-transparence.org/

Merci pour votre visite & Bon Blues !!

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