mercredi 8 novembre 2017

Séance 8


HOT ARIEGE
L’émission qui va vous faire taper du pied 
avec un paquet de blue notes 
et la rage du swing




Séance 8




1Buddy Guy
On démarre avec un bluesman toujours vivant, ce qui se fait rare, Buddy Guy. George Guy, surnommé Buddy, est né en 1936 en Louisiane. C’est en 1957 qu’il émigre à Chicago où il trouve un emploi de mécanicien. Avec Magic Sam et Otis Rush, il a renouvelé le style de Chicago en y intégrant une forte influence de B.B. King. Sa marque c’est l’atmosphère lourde, la section rythmique oppressante, le chant dramatisé. Sa voix aiguë et voilée contribue à donner de la tension.
Entre 1959 et 1967 il se produit dans les clubs et enregistre de nombreuses faces pour Chess. Il remporte des succès avec First Time I Met The Blues, Stone Crazy, My Time After Awhile.  Comme musicien de studio il accompagne aussi les grands de la marque, comme Muddy Waters ou Sonny Boy Williamson. En 1965 il participe à la tournée européenne de l’American Folk Blues Festival.
On écoute un morceau enregistré lors de cette tournée, First Time I Met The Blues, qui est aussi l’un de ses plus grands succès. Il est au chant et à la guitare et est entouré d’Eddie Boyd au piano, Lonesome Jimmy Lee à la basse et Fred Below à la batterie. Big Mama Thornton est notée comme présente mais on ne l’entend guère.
Buddy Guy reste connu pour le duo qu’il a formé avec l’harmoniciste Junior Wells. Ensemble ils ont réalisé des morceaux de grande qualité. Buddy Guy a acheté un club et effectué de nombreuses tournées de par le monde. 
Il est l’un des très grands noms du blues toujours vivant. A noter qu’il avait un frère cadet, Phil Guy, guitariste de blues lui aussi, et qui était venu en Ariège il y a une quinzaine d’années, à l’initiative d’une association nommée Pyr ‘n’ Blues, formée par un groupe de fans de blues, dont j’étais. Phil Guy avait donné un concert à La Bastide de Sérou. Il est décédé quelques années après, en 2008.


2/ Bull Moose Jackson
Nous allons parler à présent d’un saxophoniste, assez peu connu en dehors des amateurs de blues et de jazz, bien qu’il ait obtenu de nombreux succès et qu’il ait exercé une influence importante dans les années cinquante soixante. 
Il s’agit de Benjamin Clarence Jackson Jr, surnommé Bull Moose Jackson, né en 1919 à Cleveland dans l’Ohio, décédé en 1989. Bull Moose Jackson commence par tourner avec des groupes locaux durant son adolescence, jusqu’à ce qu’il soit repéré par Lucky Millinder, chef d’orchestre rhythm and blues réputé et incroyable découvreur de talents. Bull Moose Jackson devient saxophoniste ténor chez Millinder et réalise ses premiers enregistrements pour Capitol et Decca. Ce sont ses copains du groupe qui le surnomment Bull Moose, une sorte d’élan d’Amérique du Nord, à cause de son apparence physique. Il lui arrive de remplacer le chanteur vedette de Millinder, Wynonie Harris.
Très vite il enregistre sous son propre nom et c’est lui le chanteur, car c’est un superbe shouter. Son premier grand succès est I Love You, Yes I Do enregistré chez King en 1947. C’est le premier disque de rhythm and blues vendu à plus d’un million d’exemplaires. Entre 1948 et 1955, Bull Moose Jackson collectionne les succès : I Know Who Threw The Whiskey In The Well, Je sais qui a jeté le whisky dans le puits, chanson réponse à un tube de Lucky Millinder qui se posait la question de savoir qui était capable d’une telle forfaiture, All My Love Belongs To You, I Want A Bowlegged Woman, chanson considérée comme trop osée pour passer à la télé, I Can’t Go On Without You, son plus grand succès resté en tête du Billboard pendant huit semaines.
La politique de la firme King, et de sa filiale Queen, au début des années cinquante a été un moment de faire enregistrer des versions rhythm and blues de chansons country. C’est le cas entre autres de Why Don’t You Haul And Love Me, l’un des succès de Bull Moose Jackson.
Nous allons entendre un morceau rare, enregistré en 1956 pour une petite marque, Encino. Ce morceau se situe résolument dans la veine du rock ‘n’ roll. Il s’agit de Watch My Signals. 
Par la suite, Bull Moose Jackson accompagne des jazzmen, fait des concerts. Il ouvre un restaurant et se retire du circuit. Il est redécouvert dans les années soixante, il enregistre à nouveau et fait des apparitions avec un groupe nommé les Flashcats. 
Bull Moose Jackson, saxo ténor et shouter, a fait partie de ces musiciens qui pesaient lourd dans les années cinquante et ont été injustement oubliés par la suite.


3/ Albert Ammons
Après le saxo, place au piano ! Nous avons déjà parlé de la folie du boogie woogie qui s’est emparée des Etats-Unis dans les années quarante. Un moment particulier illustre ce qui s’est passé : le 23 décembre 1938, lors du fameux concert « From Spirituals To Swing » donné au Carnegie Hall à New York. Ce show est un événement de référence avec des musiciens de blues comme Big Bill Broonzy et Sonny Terry, totalement inconnus du grand public à l’époque et qui sont devenus de très grands noms par la suite, avec des musiciens de jazz de premier plan (Count Basie, Benny Goodman) et des stars du gospel (Sister Rosetta Tharpe et le Golden Gate Quartett). On imagine l’ambiance. Eh bien, quand le pianiste Pete Johnson a rejoint sur la scène Albert Ammons et Meade Lux Lewis pour interpréter ensemble, à trois pianos, le morceau Cavalcade Of Boogie, ils ont mis le feu et remporté un triomphe incroyable. Il est clair que la prestation devait être très impressionnante et il faut rappeler que le boogie woogie en 1938, trois ans après la reprise de Pinetop’s Boogie Woogie par Cleo Brown, était le genre à la mode de l’époque. A ce moment là, le boogie woogie c’était vraiment la folie !
Albert Ammons est né à Chicago en 1907 et il est mort en 1949. Je considère qu’Albert Ammons est le roi du boogie-woogie. La puissance de son jeu de basses, les fameuses « walking basses » les basses ambulantes jouées de la main gauche, est inégalée. Son swing est irrésistible, il n’y a aucun temps mort, aucune faiblesse. Ecouter Ammons, c’est comme être emporté par un tourbillon de notes magiques.
Voici Swanee River Boogie, enregistré à Chicago en 1946 avec Albert Ammons au piano, Ice Perkins à la guitare, Israël Crosby à la contrebasse et Jack Cooley à la batterie.
Albert Ammons qui a commencé à enregistrer à partie de 1936 a joué jusqu’à sa mort en 1949, malgré l’amputation d’un doigt et des crises de paralysie. Ses duos avec Pete Johnson, avec lequel il joue régulièrement après le concert From Spirituals To Swing, sont de toute beauté. 
Albert Ammons est l’auteur de chefs d’œuvre inoubliables comme Barrelhouse Boogie, Boogie Woogie Man, Sixth Avenue Express. Albert Ammons, c’est tout simplement le boogie-woogie joué à la perfection.


4/ Jimmie Rodgers
Changement de style à présent et on commence avec une question : quel est le rapport entre la country music et l’Autriche ? Tic tac, tic tac. Réponse : le Tyrol. Ou plutôt la tyrolienne, appelée yodel dans sa version suisse.  Mais qui donc aurait importé la tyrolienne, cette façon de faire des vocalises par onomatopées en alternant une voix de poitrine et de falsetto, dans la country ? Sans doute des émigrés d’origine germanique, via la musique des Appalaches, cette chaîne montagneuse de l’est des Etats-Unis où s’est développée la musique populaire folklorique à l’origine de la country.
Toujours est-il que le chanteur guitariste qui en a fait sa marque de fabrique dès les années vingt, c’est Jimmie Rodgers (Jimmie avec ie et Rodgers avec un d), né en 1897, mort en 1933. Dès l’âge de 13 ans, Jimmie Rodgers travaille sur les voies de chemin de fer où il côtoie des Noirs et il s’imprègne de blues. Il commence à enregistrer en 1927 et devient la première star de la country music.
On écoute son morceau fétiche, Blue Yodel 1 (il y aura par la suite de très nombreux autres enregistrements de Blue Yodel avec des musiciens aussi divers que Louis Armstrong ou des formations de jug bands), enregistré pour Victor et qui a marqué toute une génération.  
Toutes les versions de Blue Yodel, de la première qu’on vient d’entendre jusqu’à la neuvième où il est accompagné par Louis Armstrong, ont connu le succès. Mais Jimmy Rodgers a évidemment enregistré bien d’autres morceaux de grande qualité comme Brakeman Blues, Waitin’ For A Train ou T.B. Blues.  
Le style de Jimmie Rodgers est extrêmement proche du blues, ce qui en dit long sur les origines de la country music. Jamais on ne retrouvera une telle proximité avec le blues chez les artistes de country, si ce n’est peut-être avec les Delmore Brothers. L’œuvre de Jimmie Rodgers est immense. La tuberculose l’a emporté bien trop tôt en 1933. Jimmie Rodgers est resté une légende. Il est incontestablement le père de la country music moderne, un des très grands noms de la musique populaire américaine.


5/ LaVern Baker
Je vous emmène maintenant au cinéma. Connaissez-vous le film Angel Heart, où Mickey Rourke incarne un détective qui se fait manipuler par le diable joué par Robert de Niro ? Si vous ne l’avez pas vu, je vous le recommande, ce film est un véritable bijou. Et il y a la bande son ! On peut notamment entendre une superbe chanteuse de rhythm and blues, LaVern Baker, dans un morceau intitulé Soul On Fire. 
On écoute tout de suite ce morceau, Soul On Fire,  enregistré pour Atlantic en 1953 avec LaVern Baker au chant, Freddy Mitchell au saxo ténor, Pinky Williams au saxo baryton, Hank Jones au piano, Jimmy Lewis à la guitare, Lloyd Trotman à la basse et Sylvester Paine à la batterie.
LaVern Baker est née Dolores Evans en 1929. Elle épouse assez tôt un monsieur Williams, voilà pourquoi certains auteurs lui donnent pour véritable nom Dolores Williams. Elle est la nièce d’une grande chanteuse de blues d’avant guerre, Merline Johnson, qu’on surnommait « The Yas Yas Girl ». Elle signe chez Atlantic en 1953 et elle va enchaîner succès sur succès jusqu’en 1960. En cinq années, elle récolte 9 titres au top 10 du Billboard, ce qui la classe en sixième position, derrière Fats Domino, Elvis Presley, Ray Charles, Little Richard et Chuck Berry. Autant dire qu’elle est une des reines de cette période mythique des années cinquante, avec Ruth Brown et Dinah Washington. 
Ses morceaux les plus connus : Tweedle-dee et Jim Dandy sortis en 1957, I Cried A Tear en 1958. Elle quitte Atlantic en 1964. Par la suite elle séjournera pendant 22 ans aux Philippines dans un centre destiné à divertir les marines. Son dernier enregistrement date de 1995. Elle est décédée en 1997. 
LaVern Baker, une grande dame du rhythm and blues.


6/ Lightnin’ Slim
Et voici maintenant une autre grande figure, celle du père fondateur du swamp blues, le blues des marais de la Louisiane, Lightnin’ Slim. Lightnin’ Slim, de son vrai nom Otis Hicks, est un chanteur guitariste né en 1913 et mort en 1974. Il est le premier artiste noir à enregistrer pour le producteur Jay D. Miller qui a enregistré tous les artistes de swamp blues. 
Lightnin’ Slim a commencé par galérer énormément avant d’être repéré en 1954 par un disc-jockey. Il forme un orchestre avec Slim Harpo à l’harmonica, ou parfois Schoolboy  Cleve, et devient très populaire dans la région de Bâton Rouge. Il grave de nombreux titres pour la marque Excello et obtient quelques succès, comme Bad Luck ou Rooster Blues, sans jamais toutefois percer au plan national.
On écoute un morceau de 1960, Nothin’ But The Devil, où il est accompagné par Lazy Lester à l’harmonica.
Lightnin’ Slim était un personnage haut en couleurs. Une voix profonde et rocailleuse, des accents traînants, paresseux, dans le style si caractéristique de la Louisiane, une guitare sombre, il est le swamp blues ! Et on ne peut s’empêcher d’évoquer son admonestation fétiche à son accompagnateur « Blow your harmonica, son ! » qu’on entend dans un grand nombre de ses morceaux : joue de ton harmonica, fiston !
Ledit accompagnateur a été longtemps Lazy Lester et nous aurons l’occasion d’en reparler puisque Lazy Lester est toujours vivant, il s’est fait un nom et a enregistré de nombreux titres de grande qualité.


7/ Cecil Gant
Nous allons parler d’un pianiste à présent qui a été fortement influencé par Albert Ammons que nous avons évoqué tout à l’heure. Il s’agit de Cecil Gant, né à Nashville en 1915 et décédé en 1951. 36 ans, c’est un peu jeune pour mourir ; je ne connais pas la cause de son décès, mais il est vrai que les artistes de blues vivent rarement vieux…
Ceci Gant fait partie de la longue liste des génies du blues complètement méconnus. Il est l’homme d’un seul succès, I Wonder, sorti en 1944 chez une toute petite marque de la ville d’Oakland, Gilt Edge. Cecil Gant se place alors dans le sillage de Charles Brown et Nat King Cole. La formule préférée de Cecil Gant est simple : un boogie woogie impeccable couplé avec une ballade sentimentale bourrée de notes d’humour.
Mais Cecil Gant ne sait pas faire que cela. Pour preuve, le morceau que nous allons écouter à présent, enregistré à New York en 1950 pour la marque Decca sous le pseudonyme de Gunter Lee Carr (un hommage évident à l’immense Leroy Carr, pianiste majeur d’avant-guerre), qui annonce clairement le rock ‘n’ roll.
On écoute We’re Gonna Rock. On ne sait pas qui accompagne Cecil Gant sur ce morceau.
L’influence d’un morceau comme We’re Gonna Rock sur les pianistes des années cinquante a été considérable. Deux autres morceaux enregistrés par Cecil Gant en 1951, Shotgun Boogie et Rock Little Baby sont dans la même veine. Le décès de Cecil Gant en 1951 met fin prématurément à une carrière qui s’annonçait prometteuse. Ce précurseur n’aura pas connu la vague du rock ‘n’ roll qui démarre en 1954. On ne saura donc jamais ce que Cecil Gant aurait pu faire. Sans doute des étincelles, dommage !


8/ Snooky Pryor & Homesick James
Les deux compères suivants ont eu une carrière beaucoup plus longue, de plus de cinquante ans. Il s’agit de l’harmoniciste Snooky Pryor et du guitariste Homesick James. 
Snooky Pryor, James Edward Pryor, est né dans le Mississippi en 1921 et est mort en 2006. Snooky Pryor est venu travailler en usine à Chicago en 1940. John Lee Sonny Boy Williamson, le maître de l’harmonica à Chicago dans les années quarante, devient son mentor. Entre 1947 et 1962, il grave des titres pour des marques diverses, Marvel, Planet, JOB, Vee-Jay, sans obtenir de succès commercial. Il se retire du circuit pour se consacrer au métier de charpentier.
C’est son pote Homesick James qui le persuade de revenir en 1971. Ils feront ensemble de nombreuses tournées. Ils ont gravé ensemble des morceaux que je considère personnellement comme faisant partie des classiques majeurs du blues de Chicago.
On écoute l’un d’eux paru en 1975 chez Big Bear Records. Il s’agit d’une reprise du célèbre morceau de Robert Johnson Sweet Home Chicago, avec Homesick James au chant et à la guitare, Snooky Pryor à l’harmonica, Bob Hall au piano, Bob Brunning à la basse et John Hunt à la batterie.
Un mot sur cette référence à Chicago comme à un chez soi douillet, très utilisée par de nombreux bluesmen avant guerre et qui pourrait étonner, compte tenu de la réputation de cette ville au temps de la prohibition et de la renommée d’Al Capone. C’est une allusion aux problèmes que rencontraient les Noirs dans les états du sud des Etats-Unis, les Etats qui s’étaient prononcés pour l’esclavage pendant la guerre de sécession, toujours en proie à un racisme violent. Les événements de l’été dernier à Charlottesville en Virginie témoignent du fait que cette violence n’a pas disparu aujourd’hui. Chicago, grande ville du Nord, était considérée avant guerre par les Noirs du Sud comme un espoir et un refuge, avec la perspective d’être bien traité et d’obtenir un emploi. D’où la migration de plusieurs millions de personnes en plusieurs vagues, avant guerre et dans l’immédiat après-guerre. Sweet home Chicago !
Homesick James, de son vrai nom James Williamson, né en 1910, décédé en 2006 comme Snooky Pryor, était un cousin de John Lee Sonny Boy Williamson. C’était surtout un disciple talentueux d’Elmore James. C’est le succès d’un de ses morceaux, Homesick, qui lui donne son surnom. Homesick James a beaucoup travaillé dans l’orchestre d’Elmore James et à la mort de ce dernier il a repris son répertoire. Homesick James est resté peu connu à Chicago mais en revanche il a bien profité du revival et s’est fait un nom auprès du public européen dans les années soixante dix. Il a publié beaucoup d’albums de très bon niveau.


9/ The Doors
Voici maintenant le moment de parler d’un phénomène qui a dominé la scène musicale à la fin des années soixante : le blues boom. A ne pas confondre avec le blues revival initié dès le début des années soixante et qui a consisté aux Etats-Unis à aller rechercher les vieilles gloires du blues des années vingt / trente, à les faire remonter sur scène et à les réenregistrer. Ce mouvement a eu ses défauts, notamment quand on a demandé aux artistes de ne pas jouer d’instruments électrifiés pour plaire à un certain public blanc amateur de musique folk. Il a eu aussi beaucoup d’avantages : des géants du blues comme Son House, Mississippi John Hurt ou Skip James ont pu se produire à nouveau ; il y a eu aussi quelques découvertes majeures (on peut citer Mississippi Fred McDowell ou Robert Pete Williams) ; mais surtout ce mouvement a puissamment contribué à la diffusion et au rayonnement du blues.
Le blues boom est un mouvement très différent mais il en constitue le prolongement. Ce mouvement là a concerné la jeunesse blanche et européenne qui s’est prise d’un engouement pour le blues et s’est piquée de vouloir jouer du blues à son tour. Il y a eu les pionniers militants de la cause du blues dont les grandes figures sont Alexis Korner et John Mayall en Grande-Bretagne, Paul Butterfield, Charlie Musselwhite et Mike Bloomfied aux Etats-Unis. Il y a eu surtout de très nombreux groupes de ce qu’on a appelé un temps la musique pop, puis rock – terme plus vague et plus large que rock ‘n’ roll dont l’appellation est maintenant réservée à la musique des années cinquante – qui ont intégré une partie plus ou moins grande de blues dans leur musique. John Mayall écrivait en 1968 (cité dans le livre de Philippe Bas-Rabérin Le Blues Moderne 1945 – 1973) : « Aux Etats-Unis, la scène du blues est principalement animée par des Blancs établis sur la côte Ouest. Les musiciens noirs sont confinés dans les ghettos de villes comme Chicago et jouent pour la plupart de la soul music.. Chez les Blancs – dont les qualités de bluesmen ne me paraissent pas toujours évidentes – les grands noms sont Big Brother and the Holding Company, Blue Cheer, Doors et Jefferson Airplane. » 
Témoignage intéressant. Evidemment contestable sur le fond : tous les groupes cités jouent du rock, de la pop ou tout ce qu’on voudra, mais pas du blues qui est, bien au-delà d’une forme musicale, l’expression sociale d’une minorité ethnique aux Etats-Unis. Ce qui explique d’ailleurs que en général les musiciens en question ne parviennent pas réellement à convaincre, du moins ceux qui connaissent bien le vrai blues et ses génies, comme Mayall le relève lui-même. Mais l’important n’est pas là. L’important, c’est que le blues soit devenu en tant que tel une composante essentielle de la musique dominante du moment. Il faut insister sur « en tant que tel », car Elvis Presley jouait déjà du blues, de manière consciente de surcroît, mais il n’était pas reconnu comme tel.
Pour illustrer ce propos, j’ai choisi de vous faire écouter l’un des groupes cités par John Mayall, les Doors. Voici Cars Hiss By My Window, tiré de l’album « L.A. Woman » paru en avril 1971, juste avant la mort de Jim Morrison, le leader du groupe. 
Voilà un exemple d’intégration du blues dans la musique populaire américaine. Nous aurons l’occasion de parler de la présence du blues dans la musique d‘aujourd’hui dans d’autres émissions.


10/ Bo Diddley
Nous allons terminer l’émission avec Bo Diddley, qui se situe au confluent du blues, du rhythm and blues et du rock ‘n’ roll et qui a eu une grande influence sur les groupes de rock, l’un d’eux allant jusqu’à tirer son nom d’une de ses chansons (Pretty Things).
Bo Diddley, de son vrai nom Elias McDaniel, est né dans le Mississippi en 1928, il est décédé en 2008. Il est une figure majeure du rock ‘n’ roll noir et du rock ‘n’ roll tout court. Avec Chuck Berry, il est la star de la firme Chess de Chicago. Bo Diddley est l’inventeur d’un rythme particulier, le diddley beat, qui a connu une vogue considérable. Son premier morceau paru en 1955, Bo Diddley, d’où il tire son surnom, est basé sur ce rythme très dansant.
On écoute le morceau intitulé Bo Diddley. Il s’agit de la version originale parue chez Chess en 1955 (il y en a eu beaucoup d’autres depuis), où Bo Diddley à la guitare et au chant est entouré de James Bradford à la basse, Jerome Green aux maracas et Clifton James à la batterie.
Cette chanson et ce rythme ont été repris par d’innombrables groupes de rock et de pop. Bo Diddley est l’auteur d’autre standards comme I’m A Man, repris par Muddy Waters sous le titre Mannish Boy. Avec sa curieuse guitare rectangulaire et son jeu de scène impressionnant, qui a beaucoup influencé celui d’Elvis Presley, Bo Diddley était un showman hors du commun. Il est aujourd’hui une figure de légende.


Vous pouvez écouter les morceaux présentés ici en cliquant sur le titre de la chanson en ROUGE

Vous Pouvez écouter "Hot Ariège" en direct les mercredis a 19h sur Radio Transparence :

https://www.radio-transparence.org/

Merci pour votre visite & Bon Blues !!

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