mercredi 6 février 2019

Séance 58


HOT ARIEGE
Du swing, des blue notes et du rythme
Avec Bruno Blue Boy !


Séance 58 


1/ Magic Slim, 1937-2013 
De son vrai nom Morris Holt, Magic Slim est né en 1937 dans le Mississippi. Il s’est fixé à Chicago en 1955. C’est là qu’il a retrouvé son copain d’enfance Samuel Maghett, connu pour sa part sous le nom de Magic Sam, et qui lui a donné son surnom. 
Il a effectué ses débuts en 1957 dans un club. Par la suite il constitue un groupe, les Teardrops. Ses premiers enregistrements, effectués pour le label Jawes, datent de 1966. Ils n’ont pas connu un grand succès. 
C’est la France, eh oui !, qui va donner sa chance à ce grand bluesman. Un signe des temps, qui démontre l’importance du public européen pour la scène mondiale du blues. La carrière de Magic Slim ne décolle vraiment qu’en 1977 lorsqu’il sort son premier album, « Born On a Bad Sign », pour le label français MCM. En 1978, il est engagé par Black & Blue pour participer au Chicago Blues Festival de 1978 au cours duquel il grave un super album, « Highway Is My Home », pour Blues Reference. Bruce Iglauer inclut quatre titres de Magic Slim dans un volume de la collection « Living Chicago Blues » de son label Alligator. Dès lors, c’est parti, Magic Slim occupe une place de premier plan et sort de nombreux albums pour Alligator, Rooster Blues, Wolf Records etc.
On écoute un morceau de son premier album, « Born On A Bad Sign ». le morceau s’intitule Born In Missouri.  
Morceau enregistré en public au « Ma Bea’s » de Chicago en novembre 1976, avec Magic Slim au chant et à la guitare, Alabama Junior Pettis à la guitare, Nick Holt à la basse et Douglas Holt à la batterie.
Magic Slim a été influencé par Magic Sam et par Freddie King. Il possède cette particularité des grands guitaristes d’avoir un son qui le rend instantanément reconnaissable. Chez lui, c’est une espèce de vibrato à la guitare qui vous colle le frisson. Quand il est décédé, en 2013, cela a été une perte incommensurable pour le blues.


2/ Boots Woodall, 1921-1988
Chanteur guitariste de country music né en Géorgie en 1921, décédé en 1988. Il commence sa carrière dans les années trente, il est mobilisé pendant la seconde guerre mondiale et forme un groupe de western swing, les Radio Wranglers, après la guerre.
Il enregistre quatre chansons pour le label King en 1947. On écoute l’une d’elles, Rattle Snakin’ Daddy.
En 1949, les Radio Wranglers deviennent les TV Wranglers. Il faut bien suivre son temps ! Les Radio Wranglers s’étaient fait connaître sur une station de radio, les TV Wranglers auront leur show télévisé sur WAGA TV Channel 5. Ils enregistrent pour King, Bullet et Capitol.
En 1958, Boots Woodall participe à la création d’une importante maison de disques, la NRC, National Recordings Corporation. Il reste dans la musique jusqu’en 1963. Après quoi, il bosse dans l’immobilier. Il est décédé d’un accident de voiture en 1988.


3/ Cecil Gant, 1915-1951 
Cecil Gant est un pianiste né à Nashville en 1915 et décédé en 1951. 36 ans, c’est un peu jeune pour mourir ; je ne connais pas la cause de son décès, mais il est vrai que les artistes de blues vivent rarement vieux…
Ceci Gant fait partie de la longue liste des génies du blues complètement méconnus. Il n’a connu qu’un seul succès, I Wonder, sorti en 1944 chez une toute petite marque de la ville d’Oakland, Gilt Edge. Il grave ensuite de nombreuses chansons jusqu’en 1946. Il se produit ensuite dans des clubs de la région de Los Angeles, dans un style fortement influencé par Charles Brown et Nat King Cole. Sa popularité s’étend à tout le pays et de 1947 à 1951, il enregistre abondamment pour Bullet, Swing Time, King, Imperial et Decca.
On écoute le dernier morceau qu’il a enregistré en janvier 1951 chez Decca, Rock Little Baby.
Un morceau de 1951 qui fleure bon le rock ‘n’ roll et cela s’explique de façon naturelle : un chant syncopé sur du boogie woogie, c’est une des formules de base du rock ‘n’ roll, celle qui a été développée par Fats Domino par exemple. Cecil Gant a bien été un précurseur important du genre musical qui a dominé les années cinquante. Son décès en 1951 a mis fin prématurément à sa carrière et l’a empêché de participer à la folie des années rock ‘n’ roll. Dommage !


4/ Sidney Maiden, 1917-1987 ? 
Chanteur harmoniciste né en Louisiane. Ses dates de naissance et de décès ne sont pas connues avec exactitude. Selon les sources, il pourrait être né en 1917 ou 1923 et il pourrait être décédé vers 1970 ou bien vers 1987.
Sidney Maiden passe sa jeunesse en Louisiane mais il s’établit en 1944 en Californie. En 1945/1946, il s’associe avec le guitariste K.C. Douglas, ce qui donne un disque publié par le label Down Town en 1948. En 1952, Sidney Maiden réalise une session d’enregistrement pour Imperial ; il est soutenu par les Blues Blowers qui comprennent entre autres K.C. Douglas.
En 1955, il enregistre un 45 tours pour Flash et en 1957 un autre pour Dig Records. On écoute un morceau issu de ce disque de 1957. Le morceau s’appelle Hand Me Down Baby. Il est entouré du batteur Al Simmons et du guitariste Guitar Slim Green. 
En 1961, Sidney Maiden participe avec K.C. Douglas à des sessions d’enregistrement de Mercy Dee Walton pour Arhoolie. Il grave également cette année-là un album pour Prestige/Bluesville.
Ensuite on perd sa trace. Il fait une apparition en 1968 avec Frankie Lee Sims et puis plus rien. Comme je l’ai dit, la date de sa mort est incertaine. Certains parlent de 1970, d’autres de 1987. Sidney Maiden a fait partie de ces bluesmen qui ont maintenu dans les années cinquante, soixante, la tradition du blues rural.


5/ Pearl Dickson
On ne sait absolument rien sur cette chanteuse originaire du Mississippi ou de l’Arkansas sinon qu’elle a enregistré le 12 décembre 1927 à Memphis quatre chansons pour Columbia qui en a édité deux.
On écoute l’un de ces deux morceaux, Little Rock Blues. Elle est accompagnée à la guitare par les frères Harvey.
il convient de préciser que le morceau qu’on vient d’entendre appartient clairement au registre du blues classique. Une chanteuse comme Pearl Dickson est à distinguer d’une Bessie Smith par exemple, qui est ce que les spécialistes appellent une chanteuse de « blues de vaudeville ». La plupart du temps, Bessie Smith n’interprétait pas des airs qu’elle avait composés, mais des morceaux imposés par les producteurs, en général des titres à la mode du moment. Pearl Dickson, elle, comme les chanteurs et chanteuses de blues dit « classique », interprétait des morceaux ancrés dans la tradition rurale noire des Etats du sud. 
Le blues de vaudeville est une musique populaire noire qui est apparue sur les scènes de théâtre de vaudeville après 1900, tandis que le blues classique était joué dans les campagnes, les fermes, les plantations, les bals du samedi soir. Cela dit, il faut un peu nuancer cette opposition car les chanteuses de vaudeville ont assez rapidement acquis grâce au disque une notoriété qui leur a permis de chanter les airs qu’elles avaient envie de chanter. Quant aux chanteurs et chanteuses de blues classiques, ils ne s’interdisaient pas non plus d’interpréter des airs en vogue, d’autant que la diffusion des disques a eu une influence profonde sur la culture noire, comme sur la culture en général.
Little Rock Blues, le morceau de Pearl Dickson qu’on a entendu, figure sur le coffret Frémeaux de deux CD intitulé « Women In Blues, New York – Chicago – Memphis – Dallas 1920-1843 ».


6/ Danny & The Juniors
Groupe de doo wop formé en 1955 par quatre jeunes de la même école de Philadelphie :
Danny Rapp, leader
Dave White, premier ténor
Frank Maffei, second ténor
Joe Terranova (Joe Terry), baryton. 
C’est en juin 1957 qu’ils livrent leur première version du hit qui les a rendu célèbres, Let’s Go To the Hop. C’est un succès local racheté par ABC Paramount qui change le titre en At The Hop et le titre devient un succès national en janvier 1958. On l’écoute.
Les connaisseurs auront reconnu que ce morceau est une quasi parodie de Whole Lotta Shakin’ Goin’ On version Jerry Lee Lewis, en tout cas il s’en est fortement inspiré en ajoutant un style un peu gadget, qui aura quelques échos trois ou quatre ans plus tard chez des groupes comme les Bee Gees.
Après At The Hop, Danny & les Juniors ont classé deux titres au hit-parade et un dernier en 1960. Dave White, le premier ténor, a quitté le groupe peu après. Le groupe a continué à se produire et à enregistrer sans remporter de succès.
Le leader Danny Rapp a été retrouvé mort dans un hôtel en 1983 ; apparemment il se serait suicidé, sans que ce soit très clair. Officiellement, le groupe existe encore aujourd’hui.




7/ Cliff Scott  
Nous avons parlé dans une précédente émission du chercheur George Mitchell qui a notamment réalisé des études sur la Lower Chattahoochee Valley dans l’Alabama d’où sont originaires toute une série de musiciens qu’il a enregistrés dans les années soixante en se rendant sur place, chez les artistes. Cette région des Etats-Unis est enclavée et se caractérise par un haut degré de pauvreté. Ces conditions particulières ont permis de conserver une culture locale très fortement ancrée dans la tradition, bien loin du formatage des artistes par l’industrie du disque. Ainsi George Mitchell a pu recueillir l’expression d’un blues très pur, très proche des racines qui se sont développées au tournant du vingtième siècle. 
Les musiciens de la région ont un son caractéristique depuis les années vingt. Ces musiciens sont exceptionnels mais il n’y a pas eu de 78 tours enregistrés avant guerre dans cette région comme cela a été le cas dès les années vingt dans le Mississippi, le Texas ou à Memphis. Les guitaristes utilisent la technique du bottleneck, un goulot de bouteille ou un dé en métal qu’on fait glisser le long des cordes, mais pas à la manière des bluesmen du Mississippi.
Le chanteur guitariste Cliff Scott né à Draneville est un bon exemple de ce type de musiciens. Nous possédons peu d’éléments sur lui. Il a enregistré quatre morceaux pour Mitchell en 1969.
Le label Rounder a fait paraître en 2008 un album vinyl intitulé « Georgia Blues » sur lequel ce morceau est présent. 


8/ Arbee Stidham, 1917-1988
Chanteur multi-instrumentiste né dans l’Arkansas en 1917, décédé en 1988, dans une famille de musiciens. Très jeune il a appris à jouer de l’harmonica, de la clarinette et du saxophone. Il a accompagné Bessie Smith lors d’une tournée en 1930/1931. Il s’est fait connaître par la radio et en jouant dans des clubs.
Il s’installe à Chicago au milieu des années quarante. Grâce à Lester Melrose, le producteur grand manitou du blues à Chicago à l’époque, il décroche un contrat avec RCA Victor en 1947. Et l’année suivante il place My Heart Belongs To You en tête du Billboard rhythm and blues. Ce sera son seul succès.
Dans les années cinquante, Arbee Stidham enregistre pour Sittin In With, Checker (la filiale de Chess) et ABCO, la filiale du label Cobra auquel on a consacré une émission avec Marc. ABCO a édité quatre chansons d’Arbee Stidham. On écoute l’une d’elles, parue en 1956, Meet Me Halfway.
Dans les années cinquante, Arbee Stidham s’était mis à la guitare et il en a joué sur des albums parus dans les années soixante chez Folkways et Prestige/Bluesville. Il a enregistré jusque dans les années soixante-dix, tout en jouant dans des clubs, des festivals et lors de tournées.
Arbee Stidham est un chanteur de blues dans un style marqué par le jazz. Son jeu à l’harmonica a manifestement été influencé par DeFord Bailey et John Lee Sonny Boy Williamson, et son jeu de guitare par Big Bill Broonzy. C’est un musicien complet, à la voix profonde, agréable à écouter.


9/ Bo Carter, 1893-1964 
Armenter Chatmon, connu sous le nom de Bo Carter, est né dans le Mississippi en 1893 et il est mort en 1964. Le père de Bo Carter, Ezell Chatmon, animait un string band, un orchestre à cordes, parmi les plus réputés de Jackson dans le Mississippi. Dans les années vingt, trois de ses fils, Lonnie, Bo et Sam ont formé à leur tour avec leur frère adoptif Walter Vincson un groupe qui est devenu l’un des plus populaires des années trente, les Mississippi Sheiks. Les Mississippi Sheiks sont notamment les auteurs du morceau Sitting On Top Of The World qui a été immédiatement un immense succès commercial avec plusieurs millions d’exemplaires vendus et qui est devenu un standard parmi les standards, repris dans le blues, le folk, la country, la variété, le rock etc.
De 1928 à 1935, Bo Carter a enregistré de nombreux disques soit avec les Mississippi Sheiks soit sous nom pour les labels Brunswick, Okeh et Bluebird. On écoute un morceau de 1931 édité par Okeh : Baby, How Can It Be ? Bo Carter est au chant et à la guitare, et probablement Lonnie Chatmon au violon. 
Bo Carter est l’auteur de titres incroyables comme Banana In Your Fruit Basket, I Want You To Know ou Cigarette Blues. Il est le premier à employer le terme twist dans une chanson, dans le morceau intitulé Twist It, Babe.
Bo Carter a enregistré abondamment pour Bluebird entre 1936 et 1940. Il était immensément populaire, il a eu un succès énorme dans les années trente, ses morceaux ont connu un grand retentissement et il est à l’origine d’un tube mondial. Ses dernières années sont bien différentes. Après la guerre, Bo Carter se fait fermier, puis mendiant. Il devient aveugle dans les années cinquante, et enfin paralysé à la suite d’une attaque. Triste fin pour un des plus grands noms de l’histoire de la musique populaire américaine, bien significative du sort des auteurs soumis à l’industrie du disque et de la dureté d’une société ségrégationniste, sans sécurité sociale.


10/ Jimmy Beasley
Chanteur pianiste né en 1931 à Kansas City, Missouri. Il a fait de la boxe dans sa jeunesse. En 1954, il s’installe à Los Angeles et participe à des enregistrements avec King Perry.
Il a ensuite enregistré sous son nom pour Modern et Peacock. Ses enregistrements Modern démarrent en août 1956. Le morceau qu’on va écouter, I Want My Baby (Yea, Yea, Yea, Yea, Yea), a été gravé en mai 1957.
  Morceau tiré d’un CD publié par Ace sous le titre « Jimmy’s House Party ».
Jimmy Beasley est clairement un imitateur de Fats Domino. Nombreux sont ceux qui s’y sont essayés, cela a rarement été convaincant. Jimmy Beasley, pour sa part, réussit fort bien.
Il n’a jamais obtenu de succès national mais plusieurs de ses disques se sont bien vendus. Il s’est produit dans des clubs à Los Angeles, à Reno, à Las Vegas. On l’a vu aux côtés de Ray Charles, Fats Domino bien sûr, Elvis Presley, Ruth Brown… Il possède un club en Californie et a participé à des festivals en Europe.
Aux dernières nouvelles, il vit toujours, mais il a arrêté la musique à la fin des années quatre-vingt dix suite à un AVC.


11/ T-Bone Walker, 1910-1975
Nous avons fait connaissance avec T-Bone Walker dans Hot Ariège en écoutant son plus grand succès, Call It Stormy Monday : la version originale de 1947 et celle de 1956 pour le label Atlantic. 
Ce géant du blues, pionnier de la guitare électrique qu’il adopte vers 1935, a enregistré dès 1929 un 78 tours pour Columbia. En s’inspirant de Lonnie Johnson, T-Bone Walker a construit un style, le style de la Côte Ouest, le West Coast Blues, en s’appuyant sur une petite formation avec cuivres, piano, basse et batterie. La guitare électrique et les cuivres campent une atmosphère ouatée, vaporeuse, au sein de laquelle la voix de T-Bone émerge d’une façon suave et charmeuse. T-Bone Walker est avec Charles Brown et Lowell Fulson le grand créateur du blues de la côte ouest. 
Il joue avec Cab Calloway, Charlie Christian. En 1940, il sort T-Bone Blues et en 1942, Mean Old World, deux morceaux exceptionnels. Après une session pour Capitol en 1942, il entreprend de longues tournées et se produit dans tous les Etats-Unis : New York, Chicago, Detroit, Los Angeles. Entre 1946 et 1955, il grave de nombreux disques pour plusieurs marques. 
La carrière de T-Bone Walker connaît une interruption en 1955 pour raisons de santé. Il est longtemps absent de la scène mais il enregistre néanmoins pour Atlantic. Ainsi le morceau Two Bones And A Pick qu’on va écouter a été enregistré en 1959. T-Bone Walker est au chant et à la guitare, R.S. Rankin et Barney Kessel aux guitares, Plas Johnson au saxo ténor, Ray Johnson au piano, Joe Comfort à la basse et Earl Palmer à la batterie. Je précise que T-Bone Walker prend le troisième solo de guitare.
T-Bone réapparaît sur scène en 1960 sur la Côte Ouest et il monte ensuite dans le train du blues revival. Il participe à deux séances de l’American Folk Blues Festival. Il se produit et enregistre jusqu’en 1974 où une pneumonie mettra fin à ses jours.
T-Bone Walker a été une grande figure du jump blues, qui a été à l’honneur dans les années quarante et cinquante. Il a été l’un des grands innovateurs du blues. Il incarne la transition entre le jeu de Lonnie Johnson et celui de B.B. King.



Vous pouvez écouter les morceaux présentés ici en cliquant sur le titre de la chanson en ROUGE

Vous Pouvez écouter "Hot Ariège" en direct les mercredis a 19h sur Radio Transparence :

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Merci pour votre visite & Bon Blues !!

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