mercredi 27 février 2019

Séance 61


HOT ARIEGE
Du swing, des blue notes et du rythme
Avec Bruno Blue Boy !
Séance 61



1/  Rockin’ Sidney, 1938-1998
Sidney Simien, surnommé Rockin’ Sidney, et un temps même Count Rockin’ Sidney, est un artiste inclassable. Son style n’a cessé d’évoluer et il a joué de tout : blues, rhythm and blues, rock ‘n’ roll, swamp pop, zydeco. En plus, il chantait et pouvait jouer de la guitare, de l’harmonica, du piano et de l’accordéon.
Il a commencé en 1953 dans la formation de son oncle. Puis il a formé son propre groupe. Il a commencé à enregistrer en 1957 pour Carl, Fame et Jin. Le titre No Good Woman paru chez Jin en 1961 lui vaut une grande popularité dans le sud.
Entre 1965 et 1975, il sort plus de 50 singles chez Goldband. Dès 1965, il sort même un album publié par Flyright, « They Call Me Rockin’ ». On écoute un morceau qui porte le nom du titre de l’album.
A noter qu’on trouve ce morceau sous le titre « Rocky » dans le volume 3 de la série « Rhythm And Bluesin’ By The Bayou » publiée par le label Ace.
Le grand succès de Rockin’ Sidney est un morceau de zydeco intitulé My Toot Toot, qui figurait sur un album paru en 1984 chez le label Maison de Soul sous le titre « My Zydeco Shoes Got The Zydeco Blues ». Le titre s’est vendu à plus d’un million d’exemplaires et a reçu un Grammy Award. Il a contribué à la reconnaissance internationale du zydeco.
Malheureusement pour Rockin’ Sidney, il n’a pas pu répéter ce succès commercial par la suite. Mais il a continué à jouer, il a fondé son propre label Bally Hoo et a réalisé des tournées jusqu’à sa mort en 1998.


2/ Herman E. Johnson, 1909-1975
Chanteur guitariste né dans une famille religieuse en Louisiane en 1909. Né en 1909, cela voulait dire avoir vingt ans en 1929 ; Herman E. Johnson a été très marqué par ses recherches infructueuses de boulot dans les années de crise avec des allers-retours incessants entre la ville et la campagne, ce qu’il a retracé par la suite dans un blues intitulé Depression Blues.   
Vers 1927, il se met à la guitare, qui lui procure un répit entre la cueillette du coton et le coulage du béton. Il en joue pour son plaisir personnel et non comme professionnel. Il a bossé dans une raffinerie de Baton Rouge, la capitale de la Louisiane, puis finalement comme concierge dans une université. C’est seulement en 1960 qu’il est découvert par le musicologue Harry Oster, prof de fac à la Louisiana State University. Harry Oster réalise avec Herman E. Johnson plusieurs sessions de « field recordings », des enregistrements pris sur le terrain à Baton Rouge. Ces sessions donneront lieu à un album publié en 1972 par Arhoolie sous le titre « Louisiana Country Blues ».
Cet album vinyl a été réédité en 1996 toujours par Arhoolie. Les morceaux de Herman E. Johnson sont complétés par ceux d’un autre guitariste, Smoky Babe. On écoute un morceau de l’album, Motherless Children. 
C’est le seul album de Herman E. Johnson. Quand le vinyl est paru, en 1972, il avait déjà pris sa retraite après un AVC et il est décédé trois ans après en 1975.
Je vais redire une fois de plus - mais on ne le dira jamais assez - qu’une poignée de musicologues étatsuniens ont réalisé un boulot formidable dans les années cinquante, soixante, en sillonnant des contrées enclavées de l’Amérique profonde et en réalisant des prises de son en direct, sur le terrain, ce qui a permis de recueillir les œuvres des bluesmen authentiques de l’époque, véritables fondateurs méconnus de la musique moderne, qui ont disparu peu après. Parmi eux, saluons Harry Oster qui a découvert des personnalités comme Herman E. Johnson, ou encore le bagnard Robert Pete Williams. On est ici très loin d’une musique formatée par l’industrie du disque et la société de consommation. Il s’agit là de l’expression authentique de ce qu’un auteur a appelé « le peuple du blues ». 


3/ Doc Watson,1923-2012
Doc Watson n’a pas fait d’études de médecine. Arthel Lane Watson était un chanteur guitariste aveugle, qui jouait aussi du banjo et de l’harmonica, né en Caroline du Nord en 1923. Il doit son surnom à un auditeur lors d’un enregistrement public à la radio qui l’a appelé Doc, avec une référence explicite au célèbre accompagnateur de Sherlock Holmes. 
Doc Watson s’est fixé dans le Tennessee en 1953. Il gagnait sa vie en étant accordeur de piano et il accompagnait à la guitare électrique un orchestre de western swing. Arrivent les années soixante et l’engouement pour le folk. Doc Watson laisse tomber l’amplification et se met à la guitare acoustique et au banjo. Sa prestation au Newport Folk Festival de 1963 et 1964 est remarquée.
On écoute un morceau enregistré en public à ce festival, Going Down This Road Feeling Bad.
Doc Watson était au chant et à la guitare, Gaither Carlton au violon et Arnold Watson au banjo. Doc Watson s’est souvent fait accompagner par des membres de sa famille, notamment son fils Merle. Ce morceau est tiré d’un double album vinyl, « The Essential Doc Watson », sorti chez Vanguard en 1973. 
La carrière de Doc Watson a décollé après les festivals de Newport. Il est devenu une figure emblématique du folk revival des années soixante. Dans les années soixante-dix il a joué en trio, avec son fils Merle au banjo et un bassiste, T. Michael Coleman. Il a sorti une quinzaine d’albums entre 1973 et 1985.
Doc Watson a continué à se produire jusqu’à sa mort en 2012.


4/ Lurrie Bell
Lurrie Bell est un chanteur guitariste né en 1958 à Chicago. On peut dire qu’il est comme Obélix : il est tombé dans la marmite quand il était petit. Non seulement il est né à Chicago, au pays du blues dans les années cinquante, mais en plus son père, Carey Bell était un harmoniciste de renom sur la scène de Chicago. Dès l’âge de six ans, le petit Lurrie attrape une guitare et il apprend à jouer en bénéficiant des conseils d’Eddie Clearwater, de Big Walter Horton, d’Eddie Taylor, bref de la crème locale.
Dans les années soixante-dix, Lurrie Bell rejoint le groupe de la chanteuse Koko Taylor. En 1977, il figure sur un album de son père, puis sur un autre d’Eddie C. Campbell. Peu après il forme son propre groupe, « The Sons of the Blues », les fils du blues, avec notamment l’harmoniciste Billy Branch. Plusieurs morceaux du groupe figurent sur le troisième volume de la célèbre compilation du label Alligator « Living Chicago Blues ».
Lurrie Bell sort son premier album solo en 1989. Il s’empêtre ensuite dans des problèmes de drogue. Il refait surface en 1995 et sort une série d’albums sur le label Delmark.
On écoute un morceau extrait d’un album de 2011, « Chicago Blues, A Living History The Revolution Continues » paru chez Raisin’ Music Records. Le morceau s’appelle Stockyard Blues. 
Ce morceau me paraît constituer un exemple honnête de ce qui se fait actuellement de mieux dans le blues. La structure, la technique, les enchaînements, tout tombe impeccable et c’est agréable à écouter. Mais évidemment, c’est loin du niveau des artistes de légende des années cinquante, soixante, qui savaient innover tout en produisant des éclairs de génie. On ne peut néanmoins que saluer la ténacité de ces fils du blues qui s’évertuent à maintenir vivante la tradition du blues. The blues never die, man !
Lurrie Bell est toujours vivant et continue à sortir des albums. Son dernier, qui date de 2016, a reçu un Grammy Award du meilleur album de blues traditionnel.


5/ Buddy Guy  
Trois jeunes guitaristes ont contribué à renouveler le blues de Chicago dans les années cinquante : Otis Rush, Magic Sam et Buddy Guy. Les trois sont passés par le label Cobra auquel on a consacré une émission avec Marc. George Guy, surnommé Buddy, arrivé à Chicago en 1957, a gravé en 1958 ses quatre premiers titres chez Cobra (la sous-marque Artistic en fait), mais il ne s’est pas vraiment fait connaître sous ce label, puisqu’il a signé chez Chess juste après et c’est pour cette grande maison de Chicago qu’il a obtenu ses premiers succès : First Time I Met The Blues, Stone Crazy, My Time After Awhile...
On écoute un morceau de ses débuts chez Chess paru en 1960, Slop Around. A noter qu’on trouve aussi ce morceau sous le titre de The Slop Around.
Premier single de Buddy Guy chez Chess. 
Entre 1959 et 1967, Buddy Guy se produit dans les clubs et enregistre de nombreuses faces pour Chess. Comme musicien de studio il accompagne aussi les grands de la marque, comme Muddy Waters ou Sonny Boy Williamson. En 1965 il participe à la tournée européenne de l’American Folk Blues Festival.
Buddy Guy a formé un duo mémorable avec l’harmoniciste Junior Wells. Ensemble ils ont réalisé des morceaux de grande qualité. Buddy Guy a acheté un club et effectué de nombreuses tournées de par le monde. 
Buddy Guy est l’un des derniers géants du blues encore vivant. Il a fait paraître une autobiographie publiée en 2012.


6/ June Bateman  
June Bateman est une superbe chanteuse, née Marian June Batemon au Texas en 1939. Avec ses parents, elle arrive très jeune à New York. Elle chante dans des clubs, mais c’est sa rencontre avec le saxophoniste Noble Watts qui va l’orienter vers une carrière professionnelle. C’est elle qui chante quand lui joue du saxo.
Entre 1957 et 1965, elle réalise sept sessions pour sept marques de disques différentes, tous des labels mineurs, avec chaque fois deux titres gravés, ce qui a donné lieu à autant de 45 tours. Ces informations sont connues grâce à Gérard Herzhaft, le « pape » du blues en France que je cite souvent, qui a fait paraître un CD retraçant les œuvres complètes de June Bateman et dresse sur son blog le catalogue des sessions d’enregistrement réalisées par June Bateman. En plus des sept 45 tours originaux, deux autres maisons de disques ont publié June Bateman à l’époque, avec un morceau d’elle sur une face et un morceau de Noble Watts sur l’autre.
On écoute un morceau du premier 45 tours de June Bateman gravé en 1957 pour Swing Beat Songs, Need Your Love.
June Bateman - Need Your Love
Ce morceau figure sur le CD de Gérard Herzhaft intitulé « June Bateman, Complete Recordings In Chronological Order », mais pour être précis la version qu’on vient d’entendre était tirée d’un CD intitulé « Scratch ‘n Twist, Wild Jimmy Spruill, Rare And Unreissued New York Rhythm and Blues 1956-1962 » paru chez Night Train International.
Vous l’avez compris, June Bateman était au chant, Noble Watts au saxo ténor et Wild Jimmy Spruill à la guitare. Il y avait en plus Horace Cooper au piano et on ne sait pas qui tenait la basse ni la batterie. 
A la fin des années soixante, June Bateman a laissé tomber sa carrière pour élever ses enfants. Depuis 1984, elle vit en Floride où elle participe à l’élaboration du programme du Noble Watts Festival qui a lieu chaque année.
[Discographie de June Bateman
1957 Need Your Love / Yes I Will Holiday
1960 Believe Me Darling / Come On Little Boy Swing Beat Songs
1962 What You Gonna Do / Enjoy
1963 I Don’t Wanta / I Still Love Him Arrawak
1963 Georgia Mule / Mama I Love Him So Peanut
1964 Go Away Mr Blues / Possum Belly Overall Everlast
1965 Possum Belly Overall / Go Away Mr Blues Shaw
+ à une date inconnue I Don’t Wanna / (Noble’s Theme)   Sue Records (UK)
+ à une date inconnue I Don’t Wanta / (Noble’s Theme)    Clamike Records (US) ]


7/ Jan & Dean
Jan & Dean vont nous donner l’occasion de parler un peu du doo wop. Comme tous les courants musicaux apparus dans les années cinquante, le doo wop est à l’origine une musique noire qui constitue un style spécifique du rhythm and blues première manière, puis un style spécifique de rock ‘n’ roll. C’est d’abord un style dérivé du gospel et les grands précurseurs sont les groupes vocaux religieux comme le Golden Gate Quartet dans les années trente. Autre grand groupe précurseur qui nous rapproche encore plus du doo wop, les Ink Spots, autre groupe des années trente, mais profane celui-là, qui obtient des succès auprès des publics blanc et noir, notamment avec la chanteuse de jazz Ella Fitzgerald. 
Le premier groupe de doo wop proprement dit est celui des Orioles qui décroche un hit dès 1948, It’s Too Soon To Know. Le vrai décollage se produit en 1951 avec les Dominoes et leur incroyable hit Sixty Minute Man, qu’on a eu l’occasion d’entendre dans Hot Ariège. De nombreux groupes s’engouffrent alors dans la brèche : les Clovers, les 5 Royales, les Drifters etc. Au milieu des années cinquante, parallèlement à l’arrivée du rockabilly d’Elvis Presley, le doo wop devient une branche du rock ‘n’ roll et des groupes blancs se constituent.
Jan & Dean, William Jan Berry et Dean Torrence, forment un groupe de doo wop dans une école, une High School, de Los Angeles, The Barons, vers 1957. Eh oui, ces jeunes gens ne sont pas seulement préoccupés par les filles, les bagnoles et le football, ils chantent en plus ! En 1958, alors que Dean est mobilisé, Jan sort avec un autre membre des Barons un hit, Jenny Lee, qui atteint la troisième place du Billboard. Il récidive l’année suivante avec Baby Talk qui se classe septième. Et les années suivantes, ils sortent quelques autres hits mineurs.
Le virage se produit en 1962 avec leur rencontre du groupe des Beach Boys. Ils vont se produire ensemble et leur style prend une nouvelle allure, ce qu’on appelle le surf. Sea, sex, sun, songs, surf ! Le grand succès de Jan & Dean, c’est Surf City paru en 1963, première place au Billboard, plus d’un million d’exemplaires vendus. Mais j’ai choisi de vous faire écouter un autre titre de Jan & Dean tout aussi connu, Barbara Ann, qui a bien servi pour la publicité d’une marque de fromage !
On écoute Barbara Ann, on parlera de la chanson après. 
L’histoire de cette chanson mérite d’être rappelée. Contrairement à une opinion répandue, les Beach Boys n’en sont pas les auteurs. Ecrite par un certain Fred Fassert, elle a d’abord été interprétée par un groupe new-yorkais, The Regents, en 1961. Et ce sont bien Jan & Dean, et non pas les Beach Boys, qui sortent leur version en 1962, un an après les Regents donc, non pas sur un 45 tours, mais comme piste d’un album, « Jan & Dean Golden Hits ».
La version des Beach Boys est bien plus tardive, elle date de 1965, et il convient de préciser que c’est l’invité Dean Torrence - eh oui, le Dean de Jan et Dean ! - qui tient la voix principale et non Brian Wilson des Beach Boys ! Mais aujourd’hui on ne connaît plus que les Beach Boys et tout le monde a oublié Jan et Dean…
En 1966, Jan a été victime d’un grave accident de la route et son cerveau a été endommagé. C’est la fin du groupe. Dean est décédé en 1997 et Jan en 2004.


8/ Andrew & Jim Baxter
Duo violon / guitare de Géorgie, constitué par le père violoniste Andrew (1869-1955) et le fils chanteur guitariste Jim (1898-1950).
Les Baxter ont réalisé trois séances d’enregistrement pour le label Victor : la première à Charlotte en Caroline du Nord en 1927, la seconde à Atlanta en Géorgie  en 1928 et la troisième également à Atlanta sur deux jours en 1929.
On écoute un morceau issu de la première session, K.C. Railroad Blues. 
Andrew au violon, Jim au chant et à la guitare. Ce morceau est tiré d’un CD paru chez Document « String Bands 1926-1929 » sous le numéro DOCD-5167 (« string bands », ce sont les orchestres à cordes, essentiellement guitare, violon, banjo, parfois mandoline, assez nombreux dans les années vingt).
La dernière session d’enregistrement des Baxter date de 1929, une date assez caractéristique. Je ne sais pas ce qu’ils ont pu faire après, il n’a y a pas d’information là-dessus. Ce qui est sûr, c’est que la crise de 1929 a fait changer la politique des maisons de disques : au lieu de faire enregistrer quelques morceaux à un très grand nombre d’artistes à rayonnement local (le musicologue Manfred Miller mentionne le chiffre de 411 interprètes enregistrés entre 1923 et 1933 dans le chapitre consacré au blues d’une Histoire du Jazz parue chez Fayard), les compagnies ont préféré enregistrer une grande quantité de morceaux d’un nombre restreint de « vedettes » capables de plaire au public noir au plan national. Cette politique a été permise par l’écroulement de la concurrence ; Manfred Miller explique qu’il ne subsistait plus en 1933 que deux trusts : RCA-Victor d’un côté, l’association Columbia/Okeh et ARC Paramount rachetée en 1938 par la radio CBS de l’autre côté. Ce processus de concentration monopolistique est caractéristique des périodes de crise du capitalisme. Aux deux trusts mentionnés, il faut aussi ajouter la filiale américaine fondée en 1934 de la société anglaise Decca pour avoir le panorama complet des maisons de disques de l’époque.
Les Baxter ont donc vraisemblablement fait partie des victimes de cette politique. Tout ce qu’on sait, c’est que le fils Jim est décédé en 1950 et le père Andrew en 1955, tous les deux dans la même ville de Calhoun en Géorgie.


9/ Louis Jordan, 1908-1975
Place maintenant à un roi du rhythm and blues que les auditeurs de Hot Ariège connaissent à présent, Louis Jordan, né en 1908 mort en 1975, joueur de clarinette et de saxophone.
Louis Jordan a mis au point un style de rhythm and blues à base de jump blues et de boogie qui a joué un rôle important dans l’émergence du rock ‘n’ roll. Il est l’auteur d’un grand nombre de hits qui ont occupé les premières places du Billboard, le hit-parade du rhythm and blues.
On écoute l’un d’eux : Ain’t Nobody Here But Us Chickens, ce qu’on pourrait traduire par « Il n’y a personne ici sauf nous, les poulettes », un morceau enregistré à New York en 1946, avec Louis Jordan au chant et au saxo alto, Aaron Izenhall à la trompette, Josh Jackson au saxo ténor, Wild Bill Davis au piano, Carl Hogan à la guitare électrique, Jesse Simpkins à la basse et Eddie Boyd à la batterie (à ne pas confondre avec un autre Eddie Boyd, pianiste de blues de Chicago bien connu).
Louis Jordan était une véritable star et ce morceau a été une des meilleures ventes de l’année 1946. Une anecdote à ce propos. Louis Jordan était très demandé par les maisons de disques mais il était sous contrat avec Decca. En 1945, il a publié ses œuvres sous le nom de celle qui allait devenir sa femme, Fleecie Moore. Seulement voilà, les mariages de stars ne sont pas éternels ! Et quand le mariage a été rompu, ce qui n’a pas tardé, Louis Jordan a dû dire adieu aux royalties des morceaux qui ne lui avaient pas été crédités. Ceci inclut notamment le célèbre Caldonia Boogie enregistré en janvier 1945. Allez, je vous rassure, en juin 1946, date de la session d’enregistrement de Ain’t Nobody Here But Us Chickens tout était rentré dans l’ordre.


10/ Larry Davis, 1936-1994
Larry Davis est un multi-instrumentiste né en 1936 au Texas. Venu très jeune vivre à Little Rock dans l’Arkansas, il côtoie les bluesmen locaux et joue de plusieurs instruments : batterie, saxophone, basse, piano. Il s’associe avec le guitariste Fenton Robinson et il enregistre en 1958/1959 trois 45 tours pour Duke. Le morceau Texas Flood remporte un succès local. Maintenant, si vous tapez « Texas Flood, blues » sur Google vous tombez sur… les vidéos de Stevie Ray Vaughan qui a fait de ce morceau un succès mondial dans les années quatre-vingt. Ça, c’est le genre de truc qui m’horripile : pourquoi les copies blanches, infiniment inférieures aux originaux noirs, remportent-elles plus de succès ? Mystère. Toujours est-il que Larry Davis a déclaré avoir touché en tout et pour tout pour ce morceau 300 $, parce que le producteur de la session avait mis le copyright sous son nom. Alors si quelqu’un vous dit que ce monde est profondément injuste, vous pouvez le croire ! 
Dans les années soixante, Larry Davis s’installe à Saint Louis et son activité principale est de tenir la basse pour Billy Gayles, puis pour Albert King. Ce dernier lui apprend à jouer de la guitare et Larry Davis va avoir un peu de temps pour perfectionner sa technique car un accident de voiture le condamne à l’inactivité pendant deux ans. Il réapparaît en 1967 et l’année suivante il enregistre pour Virgo, un label qui appartient à B.B. King. Beaucoup des morceaux qu’il grave alors sont des reprises de B.B. King, comme Woke Up This Morning que je vous propose d’écouter. 
Dans les années soixante-dix, la carrière de Larry Davis a connu un creux. Il est retrouvé en 1981 par des fans, pour lesquels ses trois 45 tours pour Duke de 58/59 sont devenus cultes. Il a par la suite sorti plusieurs albums, notamment « Funny Stuff » chez Rooster Blues en 1982 et « Sooner Or Later » chez Bullseye Blues en 1992. Il est décédé en 1994.



Bonus track
11/ Guitar Kelley, 1924-2001
Arthur Kelley est né en Louisiane, c’est un chanteur guitariste de swamp blues. Il a commencé jeune, il adopte la guitare électrique en 1946. En semaine, il travaille à la ferme et il anime des soirées le week-end. En 1947 il trouve un emploi à l’université de Baton Rouge, la capitale de la Louisiane.
En 1951 il rencontre Lightnin’ Slim, le père du swamp blues, et il joue fréquemment à ses côtés. En 1967-1968, il constitue un trio avec Silas Hogan et un batteur. Ce n’est qu’en 1970 qu’il commence à enregistrer pour Arhoolie et Blue Horizon.
On écoute un morceau de 1970 édité par Arhoolie, Talk To Me Baby. 
Outre Arhoolie et Blue Horizon, Guitar Kelley a enregistré également pour Excello. Les marques européennes Vogue et Sonet ont également fait paraître des morceaux enregistré au début des années soixante-dix.
Guitar Kelley s’est produit dans des clubs de Baton Rouge. La marque autrichienne Wolf a fait paraître un album live enregistré à la fin des années quatre-vingt.
Arthur Kelley est nettement moins connu que certaines vedettes du swamp blues. C’est largement immérité car, à mon avis, il a autant de qualités que les autres. Mais sans doute a-t-il privilégié une vie stable à Baton Rouge, la capitale de la Louisiane, à la vie débridée des artistes obligés de partir pendant des mois en tournée pour faire la promotion de leurs disques. Il est décédé en 2001 à Baton Rouge.


Vous pouvez écouter les morceaux présentés ici en cliquant sur le titre de la chanson en ROUGE

Vous Pouvez écouter "Hot Ariège" en direct les mercredis a 19h sur Radio Transparence :

https://www.radio-transparence.org/

Merci pour votre visite & Bon Blues !!

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