mercredi 1 août 2018

Séance 36


HOT ARIEGE
Du swing, des blue notes et du rythme
Avec Bruno Blue Boy !



Séance 36 

1/ John Primer
Né en 1925 dans le Mississippi.
Il entame sa carrière en 1974 à Chicago où il joue dans un club jusqu’en 1980. En 1979 il rejoint la formation de Willie Dixon, les Chicago Blues All Stars, puis celle de Muddy Waters jusqu’à la mort de ce dernier en 1983. Il rentre alors dans l’orchestre de Magic Slim, les Teardrops.
Sa carrière solo démarre en 1991, date à laquelle il sort son premier album chez la marque autrichienne Wolf.
On écoute un morceau issu de l’album « It’ A Blues Life » paru en 1998 chez Wolf. Le morceau s’intitule I’ve Been Abused, c’est un classique de Willie Dixon qu’avait interprété Howlin’ Wolf. John Primer au chant et à la guitare est entouré de Tom Holland à la guitare, Steve Bell à l’harmonica, Ken Barker au piano, Nick Holt (frère de Magic Slim) à la basse et Bert Robinson à la batterie.  
John Primer - I’ve Been Abused
Du Chicago blues solide, sans bavure, impeccable.
Depuis 1991, John Primer sort quasiment un album par an. A ma connaissance le dernier date de 2017.
John Primer n’est pas un bluesman de premier plan. Il fait partie de ces accompagnateurs plus jeunes que les figures historiques et qui ont pris leur suite pour maintenir le flambeau du blues jusqu’à nos jours. C’est du bon blues, du vrai.


2/ Joe McCoy, 1905-1950
En fait, il faudrait parler des McCoy Brothers, deux frères originaires du Mississippi : Joe, parfois surnommé Kansas Joe, chanteur guitariste, est l’aîné ; Charlie, né en 1909, est chanteur, guitariste et mandoliniste. Ils ont joué séparément ou ensemble.
Alors que le second, Charlie, joue à l’origine dans un style rural classique pour le Mississippi – il a fréquenté Tommy Johnson, Ishman Bracey ou encore Walter Vincson -, l’aîné Joe adopte un style plus urbain. En 1927 il épouse la chanteuse Memphis Minnie et se fixe à Memphis. Ensemble ils enregistrent pour Columbia en 1929. Puis ils vont vire à Chicago en 1930 et là ils enregistrent pour Vocalion et Decca jusqu’en 1934, date de leur rupture.
Joe McCoy s’associe alors avec son frère Charlie venu entre-temps à Chicago. Ensemble ils constituent un orchestre, les Harlem Hamfats, et enregistrent pour Decca et Vocalion jusqu’en 1939.
Ensuite ils enregistrent sous des noms divers. On écoute un morceau de 1940, crédité à Big Joe and His Washboard Band. Sur ce morceau intitulé I’m Through With You, Charlie, n’apparaît pas : on trouve Joe McCoy au chant et à la guitare, Robert Lee McCoy à l’harmonica (il s’agit en fait de Robert Nighthawk, qui était alors musicien de studio à Chicago et qui deviendra une grande figure parmi les guitaristes), probablement Ransom Knowling à la basse et Amanda Sortier au washboard et au chant. 
Joe McCoy a enregistré quatre faces pour Okeh en 1940. Les derniers enregistrements des McCoy Brothers ont été réalisés entre 1941 et 1944 pour Bluebird qui était encore à ce moment-là la grande marque de Chicago.
Les frères McCoy sont morts à quelques mois d’intervalle en 1950. Ils font partie des artistes qui incarnent la transition entre le blues rural traditionnel et le blues urbain moderne, comme Memphis Minnie et Robert Nighthawk que j’ai évoqués tout à l’heure.


3/ Jimmy Lee Robinson, 1931-2002
Jimmy Lee est né à Chicago. Il fréquente la fameuse rue Maxwell dès l’âge de onze ans. Il joue de la guitare, plus tard il sera aussi chanteur et bassiste.
Jimmy Lee Robinson a constamment changé de groupe et il jouera essentiellement comme musicien d’accompagnement dans les boîtes ou alors de studio. En 1949, il joue avec Eddie Taylor ; en 51-52, avec Little Willie Foster, puis Lazy Bill Lucas ; en 52-53, avec Freddie King, puis Elmore James. Il se fait embaucher par Little Walter en 1955 et il part avec lui faire des tournées dans le sud jusqu’en 1959.
Il adopte ensuite la basse électrique.  Il joue avec Magic Sam, Jimmy Reed, Eddie Clearwater jusqu’en 1962. Durant cette période il enregistre pour Bandera. En 62-93, il joue avec Willie Mabon ; en 64, avec Sunnyland Slim, en 65 avec Buddy Guy.
1965, c’est l’année où il participe à la tournée européenne de l’American Folk Blues Festival. On écoute un morceau tiré du CD de cette tournée. Il s’agit de Rosalie, où  Jimmy Lee Robinson sous le nom de Lonesome Jimmy Lee est au chant et à la guitare, Buddy Guy à la basse, Eddie Boyd à l’orgue et Fred Below à la batterie.
1965, c’est vraiment une des meilleures années de l’American Folk Blues Festival, peut-être même la meilleure, grâce à des prestations exceptionnelles de géants du blues comme John Lee Hooker, Fred McDowell, Buddy Guy ou encore Big Mama Thornton. Et on voit que celle de Jimmy Lee Robinson ne démérite pas, bien au contraire. Sans parler du soutien à la batterie de celui qui fut un des meilleurs dans le genre, Fred Below. 
Par la suite, Jimmy Lee Robinson abandonne la musique. Il se fait chauffeur de taxi. Il réapparaître dans les années soixante-dix, et fera même plusieurs albums dans les années quatre-vingt-dix. 
Le jeu de Jimmy Lee Robinson est d’une très grande sobriété. C’est souvent ce qui est le plus efficace dans le blues.


4/ Lefty Frizzell, 1928-1975  
Qui était donc ce gaucher, Lefty ? Une grande figure de la country music. William Orville Frizzell est originaire du Texas. C’est là qu’il commence à chanter dans les boîtes de nuit à partir de 1950. Il est repéré par un producteur grâce auquel il peut enregistrer pour Columbia Records. Il décroche immédiatement un énorme succès avec If You’ve Got The Money (I’ve Got The Time). Tout est dit dans le titre : « Si t’as le fric, j’ai le temps ».
Dès lors Lefty Frizzell enregistre de nombreux 45 tours. Il enchaîne les succès, plaçant de nombreux hits dans les sommets du hit-parade country, dont plusieurs numéros 1. On parle de lui comme le nouveau Hank Williams, le roi de la country music.
Mais à partir de 1954, le succès décline. La raison en est simple : le succès d’Elvis et du rockabilly fait passer les artistes country à la voix qui sonne résolument « hillbilly » pour des péquenots ringards. Le film célèbre Jailhouse Rock, dont Elvis est la vedette, décrit parfaitement ce phénomène. A noter d’ailleurs que Frizzell avait fait de la taule dans sa jeunesse.
Pourtant, country et rockabilly sont extrêmement proches et de nombreux artistes country se sont essayé au rock ‘n’ roll pour tenter de rester dans le haut des charts. Ce fut le cas aussi pour Lefty Frizzell et le morceau qu’on va écouter, You’ve Hambuggin’ Me enregistré en 1958, démontre clairement ses grandes capacités en la matière.
Super morceau de rock ‘n’ roll, mais on sent bien que la voix de Lefty Frizzell ne colle pas pour les ados des années cinquante. 
Dès lors, le déclin se confirme. Le dernier succès de Lefty Frizzell date de 1964. Après il sombrera dans l’alcool et il meurt d’un AVC à 47 ans. 


5/ Bobo Jenkins, 1916-1984
John Pickens, surnommé Bobo, Jenkins est né en Alabama. En 1928, il quitte sa famille et se rend à Memphis. Il se fait nettoyeur, mécanicien, travailleur dans les champs de coton de l’Arkansas. En 1942, il se fixe à Detroit, la ville de l’automobile. Il bosse alors pour Packard, puis pour Chrysler. Il fréquente le milieu de blues, Eddie Burns, John Lee Hooker.
C’est en 1954 qu’il fait ses débuts professionnels dans le blues. Il est embauché par un club de St. Louis. Cette année-là il enregistre pour Chess le morceau Democrat Blues qui remporte un certain succès. 
En 1955-1956, il enregistre des 45 tours pour Boxer et Fortune. On écoute un morceau de cette période : Tell Me Who, enregistré pour Boxer. 
« Dis moi qui », morceau tiré de l’excellente compilation « Gonna Rock The Blues », publiée par Official en 1995, toujours disponible.
En 1964, Bobo Jenkins a fondé sa propre marque de disques, Big Star. Entre 1972 et 1977, il sortira trois de ses albums sur Big Star. A partir de 1969, il a participé à pas mal de festivals. Il a fait notamment une tournée européenne en 1982 avec l’American Living Blues Festival.


6/ Ivory Joe Hunter, 1914-1974
 Séquence rhythm and blues. Ivory Joe Hunter est un chanteur , compositeur, pianiste né au Texas. Au début des années quarante, il fait de la radio. En 1942, il va à Los Angeles. Il joue avec les Three Blazers de Johnny Moore.
Il décroche son premier hit en 1945 avec Blues At Sunrise. Il crée sa propre marque de disques, Pacific Records. En 1947, il enregistre pour Four Star et pour King.
C’est en 1950 qu’il place son premier hit numéro 1 au Billboard, le hit-parade rhythm and blues. Le morceau a été enregistré chez MGM à New York, il s’appelle I Almost Lost My Mind et on l’écoute.
Ivory Joe Hunter est au chant et au piano, Taft Jordan à la trompette, Bill Pemberton à la basse et Kelly Martin à la batterie.
Le succès de Ivory Joe Hunter est considérable. Il a placé pas mal de chansons dans le Top 10. Citons encore Since I Met You Baby en 1956.
Il aurait écrit plus de 7000 chansons ! Beaucoup ont été interprétées par de grandes vedettes, notamment Elvis Presley. Son succès durera jusque dans les années soixante, y compris dans le milieu de la country music, ce qui est plutôt étonnant.


7/ Ella Mae Morse, 1924-1999
 Ella Mae Morse est une artiste inclassable. Ella joué tous les genres de musique et son style mélange jazz, rhythm and blues, gospel et country. 
Elle n’a pas 15 ans en 1939 lorsqu’elle entre dans l’orchestre de Jimmy Dorsey, une des stars de l’ère du swing. Elle rejoint ensuite l’orchestre de Freddie Slack et c’est avec lui qu’elle enregistre en 1942 Cow Cow Boogie qui donnera à la firme Capitol son premier disque d’or.
Sa carrière solo démarre en 1943. Elle décroche cette année-là un hit numéro 1 au Billboard, Shoo-shoo Baby. On écoute l’un de ses morceaux les plus connus, The House OF Blue Lights, qui date de 1946 : Ella Mae Morse chante, Don Raye seconde voix, Freddie Slack piano, George Van Eps guitare, Jack Ryan basse et Nick Fatool batterie 
The House Of Blue Lights n’a pas décroché de hit à l’époque mais pour les connaisseurs c’est un morceau qui compte dans l’histoire du rhythm and blues. Son approche très moderne pour l’époque a exercé une vraie influence et il fait partie des morceaux précurseurs du rock ‘n’ roll. Chuck Berry, Jerry Lee Lewis et beaucoup d’autres l’ont repris. On le trouve dans une quantité de compilations consacrées au rhythm and blues.
La grande année pour Ella Mae Morse c’est 1952. Cette année-là sortent Blacksmith Blues, numéro 3 au Billboard, plus d’un million d’exemplaires vendus et Oakie Boogie, classé aussi au Billboard, à mi-chemin entre la country et le rock ‘n’ roll.
Ella Mae Morse cesse d’enregistrer en 1957. Elle a continué à jouer dans des clubs jusque dans les années quatre-vingt-dix. Elle est l’une des rares chanteuses non afro-américaines à avoir joué un rôle dans l’histoire du rhythm and blues, un peu comme Johnny Otis chez les hommes.


8/ Bob Wills, 1905-1975  
Nous avons déjà eu l’occasion d’écouter dans Hot Ariège le fantastique morceau de country music, Steel Guitar Rag, un des fleurons du western swing dont Bob Wills, figure majeure de la country, est l’un des créateurs. 
Bob Wills forme son groupe, les Texas Playboys, en 1932 / 1933. Le groupe doit son nom à une marque de farine, la Playboy Flour, qui sponsorise le groupe ! Le groupe augmente peu à peu et en 1934, il compte outre Bob Wills au violon, un chanteur pianiste, un guitariste rythmique, un banjo, deux steel guitars – l’instrument en acier à la sonorité si particulière -, une batterie, une trompette et un saxo.
Amalgame de jazz, de blues et de country, le western swing est devenu dans les années quarante le genre dominant de la country music et les formes qui en sont issues, comme le country boogie et le honky tonk, joueront un grand rôle dans l’émergence du rockabilly, le courant sudiste qui a formé le noyau dur du rock ‘n’ roll.
On écoute Milk Cow Blues, un morceau du bluesman Kokomo Arnold, joué également par Sleepy John Estes et Big Bill Broonzy, dont le frère cadet de Bob Wills, Johnnie Lee Wills avait sorti une version country en 1941. Celle de Bob Wills date de 1946.
Ce morceau est devenu également un classique du rock ‘n’ roll avec les versions d’Elvis Presley et Eddie Cochran. Blues, country, rock ‘n’ roll, on a ici un bon exemple de la manière dont ces genres différents se rencontrent.
Surnommé le king du western swing, Bob Wills a vendu des millions de disques. Il a reçu un disque d’or en 1944 pour le morceau San Antonio Rose dont les premiers mots sont gravés sur sa tombe. 


9/ John Lee Sonny Boy Williamson, 1914-1948  
Les auditeurs de Hot Ariège savent maintenant qu’il y a deux Sonny Boy Williamson, un vrai et un faux. Le vrai nom du faux est Rice Miller et il a usurpé le nom du premier dont l’aura dans les années quarante était considérable dans le monde du blues et de l’harmonica. Et, suprême injustice, le nom de Sonny Boy Williamson reste encore aujourd’hui associé au faux, qui était un des génies du blues de Chicago dans les années cinquante soixante, alors que le vrai, John Lee Sonny Boy Williamson (on distingue le vrai en nommant son prénom, John Lee), est tout de même celui qui a contribué d’une part à faire de l’harmonica un instrument essentiel du blues et d’autre part à forger la formule du blues de Chicago moderne
On a eu l’occasion d’entendre dans Hot Ariège un de ses duos avec le guitariste Big Joe Williams. Je vous propose de l’écouter dans un morceau de 1945, Sonny Boy’s Jump. Sonny Boy est au chant et à l’harmonica, Eddie Boyd au piano, Big Sid Cox à la guitare, Ransom Knowling à la basse ; on ne sait pas qui tient la batterie, peut-être Jump Jackson qui la tenait dans une séance d’enregistrement similaire dix jours plus tard.
On trouve ce morceau dans une série éditée par le label JSP. Elle s’appelle « The Original Sonny Boy Williamson, The Laters Years 1939-1947 » et Sonny Boy’s Jump figure sur le CD C, 1942-1947.
John Lee Sonny Boy Williamson a appris qu’un usurpateur se faisait passer pour lui dans le sud. Il a voulu aller lui faire la peau. Il n’aura pas eu le temps. Il est mort assassiné le 1er juin 1948.


10/ Big Jack Reynolds   
Chanteur, guitariste, harmoniciste de Toledo dans l’Ohio. Il a sorti plusieurs 45 tours chez de petites marques, Hi-Q, Mah, dans les années soixante. Il s’agit en fait de Chicago blues de bonne facture. 
Je vous propose d’écouter un morceau plus récent tiré d’un album intitulé « Broke and Disgusted » paru chez Highball Records fin des années quatre-vingt. Le morceau s’appelle Poor Boy. 
Big Jack Reynolds au chant, à la guitare et à l’harmonica, Larry Gold à la guitare, John Henry Newmark à la basse, Chad Smith au piano et Slim Tom Gahagan à la batterie. 
 Big Jack Reynolds est décédé en 1994. On ne peut que regretter que l’Ohio n’ait pas été une région plus favorable au blues et que Big Jack Reynolds n’ait pas bénéficié du soutien d’une grande marque.


Vous pouvez écouter les morceaux présentés ici en cliquant sur le titre de la chanson en ROUGE

Vous Pouvez écouter "Hot Ariège" en direct les mercredis a 19h sur Radio Transparence :

https://www.radio-transparence.org/

Merci pour votre visite & Bon Blues !!

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